Au moment où de fort nombreux universitaires (« enseignants-chercheurs » ) clament qu’on les dérange, s’indignent qu’on prétende dépoussièrer leur statut et les universités, ce que j’ai pu écrire sur le sujet dans le passé me semble toujours d’actualité, car rien n’a changé, et surtout pas les mentalités. A quoi ça sert qu’on écrive des billets, hein, je vous le demande ? On reprend donc tout depuis le début.
– Enseigner dans le « Supérieur » ne présente pas de grandes différences avec enseigner dans le « Secondaire ». On a des programmes, des plans de cours, on prépare les cours, on enseigne, on contrôle les connaissances… mais, c’est vrai, on fait moins de discipline, on a des effectifs tantôt pléthoriques – un amphi – tantôt squelettiques – 4 pelés pour un cours peu couru. Mais c’est du travail d’enseignement. Très utile, au demeurant. Et demandant des capacités de pédagogue (ça s’apprend, en partie). Mais ça ne justifie pas non plus un statut à part. Une formation plus solide, peut-être ?
– Chercher, c’est une autre activité. Sans exigence de pédagogie autre que la clarté des idées et du propos. Et ça se définit d’abord par un but ! Imaginez le dialogue : « Vous faites quoi (‘que faites-vous’, en français) comme métier ? – chercheur » … la première question qui vient aussitôt aux lèvres : « Ah, et vous cherchez quoi ? » (‘Ah, et que cherchez-vous ? ‘ en français). Eh oui, la réponse pourrait être « je fais de la recherche sur les migrations des grues en Zambie-inférieure », ou « sur la topologie algébrique des compacts semi-ouverts », ou « sur la partition des ovocytes en milieu anhydre »… bref « chercheur » c’est d’abord un projet, et ensuite, et en conséquence, les moyens et le statut permettant de mener à bien ce projet.
Que certains chercheurs soient de bons enseignants ? c’est bien possible. Que ça puisse les motiver ? pourquoi pas ? mais qu’on cesse de marier de force ces deux activités. Qu’on cesse de mesurer le niveau de la « recherche » au nombre de publications : il n’a jamais été aussi facile de publier, merci la Toile. En revanche, les idées, c’est rare…
Un des arguments forts de la révolte actuelle, c’est la crainte de voir la réforme étendre l’arbitraire des « mandarins »… il y a donc des « mandarins » ? des gens susceptibles de constater, de juger, la vacuité, la pauvreté de certaines « recherches » ? des gens qui, de plus, occupent des postes de pouvoir, juteux, peinards et respectés ? sans hypocrisie, n’est-ce pas le but de la carrière de nombreux enseignants-chercheurs ?
Les bons chercheurs ne sont pas toujours les bons professeurs, certes. Mais pour enseigner à l’université, donc sur des sujets aussi variés que précis, il faut savoir chercher… disons que ce sont des activités complémentaires.
Devrait-on donner de meilleurs salaires à ceux qui enseignent ?? hum… Essayer de demander que les compétences des enseignants soient évalués, et que ceux-ci soient formés correctement ? Des efforts sont faits, mais on est très, très loin du compte…
Quant aux mandarins… sans hypocrisie, le but de tous les JEUNES enseignants-chercheurs, c’est de s’en débarrasser – pas pour devenir des mandarins : pour pouvoir être reconnu à leur juste valeur (pas comme « connaissance de x, ami d’y ».