Les temps qui courent sont propices aux associations caritatives. Noël Noël Noël, tous les jours ma boîte à lettres (et pas ma boîte aux lettres, bande d’ignares… on va au bouc, et chez le coiffeur), ma boîte à lettres, donc, regorge de « s’y vous plait, une p’tite pièce, un ticket-restaurant, un chèque en blanc… ». Pour les orphelins Neuilléens, les gosses de Roumanie, les Paraplégiques de Neuville-La-Vieille, les Sidaïques Albinos, les Transfusés du Danube, les Arthritiques du Gros Orteil… bref, tout plein d’associations toutes plus utiles et charitables les unes que les autres m’incitent à ébrêcher mon compte en banque à leur profit.
Par dessus ça, le Trésor Public, autre noble cause, tire avec insistance sur les basques de mon paletot pour que je donne à ses Oeuvres et à ses Pompes (ruineuses, les pompes). Avec des arguments très persuasifs, lui : c’est ça où ça va douiller ! des mesures coercitives, en somme.
Entretemps, monsieur Pierre Bergé (pas Michel Berger, lui chantait mieux, mais il est mort ; non, le mécène de Ségolène-Soeur-Sourire, l’ex du regretté St-Laurent), monsieur Bergé, donc, pond un pamphlet contre le Téléthon. « Le Téléthon y en a marre, il pompe tout et injustement, il en faut un peu pour les autres, zut quoi », écrit-il en substance. Je résume.
Je ne puis que souscrire à ce point de vue.
Premièrement, le Téléthon est une grosse machine copiée sur le cirque Etats-unien du même nom, avec du ramdam, de la retape, du presse-citron télévisuel, de la larme à l’oeil en veux-tu en voilà. On y récolte pas mal de picaillons, certes, mais pour quoi faire ? mystère. La mucoviscidose, la myopathie sont toujours là, comme le Pont-Neuf et les Orphelins d’Auteuil-Neuilly-Passy.
Deuxièmement, je ne vois pas à quel titre la myopathie serait tellement plus importante que le Sida. Quitte à donner mes pièces jaunes, pourquoi ne me propose-t-on pas un mélange, une répartition harmonieuse entre les différents fléaux de la planète ? ce serait en quelque sorte un « portefeuille de dons », équitable ou presque.
Troisièmement… troisièmement, je fatigue, et je suis loin d’être le seul, parce qu’on n’arrête pas de me solliciter. Il est bien entendu, n’est-ce-pas, il est bien entendu que le solliciteur le plus comminatoire, là, le Ministère des Finances, avec ses avis d’imposition… son boulot, c’est en principe : premio, se payer, et puis payer la ribambelle d’agents des Services Publics, et l’Etat, et les Monuments Historiques, les petits fours du Ministère de la Communication, le Mobilier National, les voitures de fonction des sous-secrétaires des sous-préfectures du Gave-Inférieur, et j’en oublie probablement… deuxio, opérer une péréquation entre les plus aisés et les plus pauvres, les bien-portants et les malades calamiteux.
Alors, cette péréquation, hein ? où est-elle passée, la péréquation ? mesdames et messieurs les quémandeurs de tout poil, adressez-vous donc à mon Trésor Public, c’est lui qui a les sous.
Tibert