Aux tonnes (G. Appeaux linaires)

C’est un fait : l’orthographe fout le camp. L’orthographe, et la grammaire, et le passé simple, pour ne rien dire de l’imparfait du subjonctif. Plus il est simple et rapide de corriger un texte – un ordinateur à deux balles, un coup de traitement de texte, efficace et peu coûteux – plus il est courant de nos jours de trouver des coquilles, des fautes d’accord, des barbarismes, des à-peu-près, bref, des erreurs, dans les journaux et les livres.
Pire, on réécrit les livres pour la jeunesse – le « Club des cinq »… –  qui utilisaient logiquement le passé simple – le temps du récit, au présent : c’est plus facile, encore qu’avec ces putains de verbes du 2ème et 3ème groupe ça soye pas de la tarte. Il faut se mettre  à leur niveau, ces chers petits. Nous-mêmes, de notre temps, devions probablement ne rien comprendre à ce que nous lisions : le passé simple, fi donc, quel obscur charabia.

Bon, en matière de fautes d’orthographe, l’erreur est humaine, et personne n’est à l’abri d’une étourderie, même pas moi. Mais la relecture n’est pas pour les chiens, que je sache. Qu’on ne relise pas les quotidiens, ou à peine, ça peut à la rigueur se pardonner, le lendemain c’est oublié. Encore faudrait-il exiger des journaleux un niveau plus que moyen. Mais un livre, zut quoi ! un livre c’est pérenne, ça passe de main en main, c’est une balise.

Le « Que choisir » de ce mois-ci m’a fait hurler de rire, traitant de cette nouvelle tendance très moche des éditeurs à ne plus relire sérieusement leurs ouvrages (*). Il s’agit d’un opus de Stéphane Hessel, édité au Seuil en 2006, intitulé « Ô ma mémoire« . Dans ce texte que je n’ai pas lu, monsieur Hessel, l’indignateur professionnel, doit probablement citer des poèmes qui lui sont resté gravés en mémoire, justement, des vers qui nous parlent aussi, que nous avons aimés, que nous aimons  – tenez, Guillaume Apollinaire, « Automne » :

Dans le brouillard s’en vont un paysan cagneux
Et son bœuf lentement dans le brouillard d’automne
Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux

Monsieur Hessel cite donc ce poème, et ça donne aux éditions du Seuil, 2006 :

Dans le brouillard s’en vont un paysan khagneux…

Non mais, rassurez-moi, ils l’ont fait exprès ? c’est de l’humour ?

Thibaire

(*) Si la relecture pouvait se sous-traiter en Chine, au Pakistan, en Malaisie, payée 3 Carambars et un coup de pied au derrière, alors évidemment, ça pourrait se faire. Mais que voulez-vous, on ne sait pas encore délocaliser ça.

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