Non, je ne cèderai pas à la Chi-chi-mania de circonstance. Il est mort, DONC je devrais produire un billet sur l’homme, sa vie, son oeuvre ? mais c’est exac-te-ment le même bilan qu’il y a, disons, un an, deux ans, vu que ça fait un bail qu’il a fermé le ban, qu’il n’interfère plus dans la sphère publique. On aurait pu écrire sa rubrique nécrologique depuis longtemps, depuis sa descente terrible et irrémédiable. On ne souhaite ça à personne.
Ceci dit, il savait lever le coude pour un demi-pression, il avait un excellent coup de fourchette, notamment pour la tête de veau – quoi de plus populaire qu’une tête de veau ravigote ? les amateurs de mahousses homards bretons et de risottos crevettes-artichauts (*) auraient de quoi réfléchir à leur image et leur régime -, il était expert à flatter le cul des vaches au moment opportun, et serrer les paluches. Et alors ? il a, demi-gâteux, déclaré vouloir voter pour Moi-Normal-Président, comme si se réclamer de la Corrèze était un critère potable. Il a fait une ééénorme boulette en 1997 avec sa dissolution de l’Assemblée, ce qui nous a permis de goûter à une longue séance de Jospinerie « sentiment d’insécurité ». Ses réformes furent marginales – ne lui enlevons pas la baisse spectaculaire des morts sur la route, mais là il n’y avait aucun syndicat pour couler l’initiative… il ne s’est jamais attaqué au gras du bide du pays, les fonctionnaires inutilement nombreux, les régimes spéciaux, les inégalités devant le travail. Ou plutôt si : il a essayé avec Juppé, dans les six mois de ses débuts débutants, et puis il a échoué, une fois, comme on dit à Bruxelles. Ensuite il s’est calmé… douze ans c’est long ! Heureusement, sur la scène internationale, aucun syndicat rétrograde n’étant là pour lui casser ses effets, il a pu réussir quelques beaux coups, via son Villepin de ministre entre autres.
Ah zut je m’aperçois que j’ai bâti à l’insu de mon plein gré un éloge funèbre de Jacques Chirac, Président de la République de 1995 (face à Balladur-Jospin, bien joué) à 2002 (face à Le Pen, un raz de marée) et à 2007, clap de fin, en roue libre. Bon, l’ordre des choses étant ce qu’il est, il avait de bons côtés, cet homme. On en trouve toujours, dans ces circonstances ; on le regrettera.
Tibert
(*) C’est beaucoup moins luxueux que le homard, le risotto, même avec des crevettes, même saupoudré de vrai parmesan râpé… presque plébéien… ! la faute, c’est le lieu où on le mange ! le Fouquet’s, quelle erreur de casting ! De fait, le Manuel du Bon Président précise ceci, pour faire peuple : 1) manger des plats rustiques et montrer qu’on apprécie ; 2) dans des gargotes, pas trop crades quand même ; 3) le faire abondamment savoir.