Alternatives à Venise

Le Pas-de-Calais en a ras les bottes, des inondations… c’est encore re-re-rebelote et dix de der ces jours-ci : l’Aa (court cours d’eau, bien connu des cruciverbistes), la Canche, la Liane, la Lys… tout ça déborde, et c’est terrible, parce qu’on ne peut rien faire contre l’eau.

Enfin, si, on peut, ou plutôt on va pouvoir ! Ce qui est cuit est cuit, trempé fichu, les baraques inondées, c’est trop tard, les habitants sont nombreux à baisser les bras : ils s’en iront, écoeurés. Conscient de la désespérance des habitants de ces cités lacustres malgré elles, le gouvernement a réagi… deux ministres ont mis des bottes hautes, sont venus affronter les colères, les pleurs et les récriminations : c’est que c’est, comme d’hab, la faute au gouvernement ! Pourtant…

On a bétonné bétonné ; on a arasé déplanté artificialisé aplani construit bâti cimenté étanché goudronné… le résultat c’est que l’eau ne peut plus s’écouler. Alors, elle reste, l’eau… où voulez-vous qu’elle aille ? eh bien il va falloir construire autrement.

Les parkings de supermarchés asphaltés à perte de vue, c’est mort, c’est nul : des plots engazonnés, des grillages de sol sur de l’herbe, des drains, des pentes calculées. Evidemment les caddies auront du mal à y rouler, chargés des packs de bière… eh bien il faudra réinventer d’autres caddies. Et accepter de patiner un tantinet dans la gadoue. Songez, le ministre Véran, dans un éclair de lucidité et de parler-vrai, énonce qu’il faudra déclarer certaines zones, inconstructibles ! c’est pourtant une évidence, le bon sens même, et l’on a trop longtemps compté sur la chance, le ciel, la baraka, la crue centenaire, construit n’importe où, « les pieds dans l’eau » : eh bien les pieds dans l’eau, finalement, ça n’est pas le pied, c’est même horrible.

Venise va mourir, c’est annoncé : les hordes de touristes s’y pressent pour constater la chose, cocasse télescopage puisque c’est d’abord le tourisme qui tue Venise. Nous avons dans le Pas-de-Calais et ailleurs – la Haute-Saône, tiens ! – une relève qui nous tend les bras, des cités lacustres en devenir, des Grands Canaux majestueux à imaginer, des Ponts des Soupirs à bâtir, des vaporetti du 6-2 ou du 7-0 pour véhiculer les travailleurs et les badauds, entre Dorsoduro et Canareggio du coin. C’est un défi ? c’est un défi, mais au lieu de maudire le ciel, ça pourrait motiver les hommes. Et puis c’est beau, l’eau, quand on sait vivre avec.

Tibert

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