Trop, la haine

Monsieur Mélenchon encensait, il y 4-5 jours, les « étudiants »- ou réputés tels – qui occupaient manu militari les locaux de Sciences-Po-Paris, cette ancienne gloire de l’enseignement supérieur, en empêchant le fonctionnement, prenant les autres étudiants en otages : ils étaient, selon lui, « l’honneur de notre pays face au génocide » (à Gaza). Mais en ce Premier Mai du muguet et des défilés, on a vu monsieur Glucksmann, qui voulait participer au cortège traditionnel à Saint-Etienne, se faire éjecter violemment, « casse-toi » etc, jets de projectiles et autres gracieusetés. On sait bigrement bien d’où ça vient, ça : des mêmes furieux qui sévissent à Sciences-Po. Il a fallu l’exfiltrer pour préserver son intégrité physique… Mais là, monsieur Mélenchon réprouve cette violence… c’est pas bien ! pas correct ! En démocratie, on doit pouvoir librement s’exprimer, y compris les affreux qui sont pas à LFI, même Glucksmann, tiens ! Si vous voyez comment ça fonctionne, là sous le crâne mélenchonien, un coup je glorifie la violence sectaire, un coup je la condamne… comprenne qui pourra.

Et puis j’ai pu lire que le jeune Afghan qui a « planté » mortellement Matisse, à Châteauroux, pour une histoire de coqs et d’insultes éventuelles – histoire qui aurait dû se solder au pire par quelques gnons – avait déclaré dans un post sur Poubelle-Réseau : « J’ai trop la haine » . Trop, c’est le cas de le dire ! Cet adverbe connement devenu l’équivalent de « très » permet de gommer les limites, limites que « trop » implique : « j’ai trop bouffé » , « tu en as trop mis » etc. Le langage a du sens…

Dans la même veine si je puis dire, on voit des maniaques de la menace de mort – encore des haineux – et anonymes bien entendu, s’en prendre sur les mêmes néfastes réseaux-égoûts à une magistrate, soi-disant responsable d’avoir laissé l’adolescent agresseur en liberté, alors qu’il est (tout de même !) sous le coup de deux inculpations pour vol avec violence. Le parquet de Bourges proteste, à juste titre : et de une, ladite magistrate n’est pour rien dans cette embrouille ; et de deux, les magistrats ne font que leur boulot, ces vociférations menaçantes sont inacceptables… ils s’indignent, ces magistrats, je cite, « contre le fait (…) de critiquer violemment l’action légitime de magistrats qui, etc etc… » . Là je tique : « violemment » , certes, mais quel « violemment » ? Il est en effet indispensable, en démocratie, que la Justice soit susceptible de se faire « botter le cul » – au figuré, évidemment (*) – quand elle commet des fautes. Elle a des comptes à rendre, la justice. Dans cette affaire, eh oui, un juge a commis une faute, flagrante, le surineur n’aurait pas pu suriner s’il avait été sous les verrous ; sa dangerosité a été largement sous-estimée. Ce n’est pas « la faute à pas de chance » ; c’est la faute d’un magistrat. Ce qui, bien entendu, ne justifie absolument pas de lui promettre la mort, encore moins anonymement.

Tibert

(*) On en est loin. Ces messieurs-dames sont pratiquement inaccessibles. Saluons, au passage, ironiquement, l’entêtement de notre Justice dans une gestion des mineurs totalement déconnectée de la sinistre réalité… chers petits anges !