Hier j’ai racheté (pas acheté : racheté, si si) des godasses de course ; mes vieilles Pegasus sont bien fatiguées. En fait, je suis reparti du magasin avec sous le bras des godasses de running.
Voilà : on ne court plus, on run. Ou plutôt on « fait du running » (il y a quelques années on faisait du jogging, comme en des temps plus lointains on faisait du footing, bref : on courait !). On « fait du running » comme on fait des pâtes au beurre, comme on fait de l’exéma… « on fait » + « du » + un truc-en-« ing ». Il reste encore quelques ilôts de parler normal, par exemple on baise, on ne fait pas encore du fucking, mais ça viendra.
Mais qu’est devenue la course ? quelle course ? ben, LA course… avec quoi ? avec ses pieds, tiens. Courir… tagada tagada… comme quand on était gamins… on courait… la course !
Oui mais non, « course » c’est ambigu, ça peut être les courses à vélo, à ch’val, en bagnole, en mob’ autour de la cité, au marché du coin… tandis que « running » c’est clair, ça veut dire la course à pied.
D’accord admettons mais alors « course à pied » ça le ferait pas ? ah c’est trop long ? alors « course » tout court – sous-entendu « à pied« , LA course de base, quoi – c’est encore trop long ? cour-se contre run-ning, trop long ?
Et « chaussures de course à pied« , c’est moins précis que « chaussures de running » ? et puis pourquoi préciser « course à pied« , puisque c’est des godasses, c’est forcément pour les pieds, non ? pour la course à pied !
Ah mais pas du tout, y a des godasses pour la course à vélo, pour la course sur piste, pour la course en sac, la course en montagne… et le running ! pour courir, quoi.
Bon soit l’anglais est toujours plus court, admettons… y a plein de contre-exemples, « technique » par chez nous ça donne chez eux « technology« , « chéri » c’est sweetheart« , « marié » c’est « bridegroom« , mais bon, soit, l’anglais est plus court…
Oui mais « run » ça prend plein de sens en anglais, c’est loin d’être clair… tenez, « the butter runs » ? hein ? le beurre fait du running ? de la course à pied ? ben non, « le beurre fond« . Et « the tide runs » ? la marée court ? au Mont-St-Michel ? comme un bourrin cataclop cataclop ? que nenni… « la marée monte« . Alors, vous voyez, « run », c’est n’importe quoi.
Et puis, « is the engine running ? » c’est « est-ce que le moteur marche » ? Tiens, voyez ! run = marche ! il court pas, il marche. Moi ce que je voulais c’est des godasses de course, pas de marche.
Tibert