( C’était une psy débutante de mes amies, stagiaire dans un centre médico-machin pour gosses à problèmes : des ateliers-terre, modelage, vous voyez le truc… elle eut à rédiger son inévitable rapport de stage, comme de bien entendu, et y écrivit, entre autres considérations vaines et convenues, et dans le lyrisme abscons qui prévalait à l’époque pour toute communication intellectuelle (« D’où tu parles ? », etc…) : « Tout m’est pâte, je suis pâte à moi-même« . Epatant, non ? )
Mais, foin du G7 et des menus des bouffes de ces messieurs-dames ! je m’en tape. Et je tombe, ce matin, sur le site France 24 qui énonce « Chappe de plomb sur le Cachemire« . Et d’une, mon correcteur orthographique proteste sur chappe ; et puis je le savais, chape, pas chappe ! Bref je suis allé voir tout ça, et j’en reviens à peine. Car chape vient du latin cappa, avec deux p ! un p s’est égaré… mais tenez-vous bien, l’llustre Littré énonce ceci :
Chappe : poignée servant à fermer, à ouvrir un moule. On en apprend tous les jours ! Un moule, pas une moule, notez bien, quoiqu’un poignée d’ouverture des moules (pour les cuire en marinière, avec un Muscadet bien frais) serait bien pratique, et des huitres, donc !
Et j’y apprends par ailleurs que chape peut aussi bien s’écrire chappe ! Mes certitudes vacillent, en ce dimanche ensoleillé. Mon correcteur orthographique est un gros nul. Pour finir, je tombe sur Claude Chappe, le célèbre inventeur du télégraphe – et de ce mot, donc, qui le définit. L’industrialisateur des signaux de fumée, le type qui a permis de reléguer le coureur de Marathon au fond du classement : l’annonce d’une victoire en une heure à peine ! Je cite : « Le 1er septembre 1794, la ligne de sémaphore informa les Parisiens de la victoire de Condé-sur-l’Escaut (240 km de Paris, NDLR) sur les Autrichiens moins d’une heure après l’événement, grâce à une tour élevée sur le mont Valérien« . Philippidès le coursier grec n’avait, lui, que 42 bornes à couvrir pour annoncer la victoire, et il en est mort.
Bref, le télégraphe de Chappe, avec deux p, était en somme le précurseur de nos mobiles. Ceci dit, vu le boulot que c’était pour transmettre toutes les gesticulations signifiantes des bras articulés en haut des collines, on évitait d’en rajouter, à l’époque, et surtout pas des fake news – oups, pardon, des infox.
Tibert
Comme c’est curieux…. pour moi, une « chappe » avec deux « p », c’est aussi le lourd vêtement brodé d’or et/ou d’argent que les ecclésiastiques portaient autrefois par-dessus leur soutane et leur surplis pour dire la messe : y’en avait en forme de violoncelle et d’autres droites, mais le plus souvent avec un travail de broderie falubeux ! Et ça pesait un âne mort. Mais j’ai vu jadis notre évêque orthodoxe, Monseigneur Stéphane Charalambidis, à l’époque évêque de Nice, paré par les bonnes soeurs pour une liturgie solennelle, : il ne pouvait ni s’habiller ni se déshabiller tout seul et – couronne comprise – il en avait pour près de 40 kilos sur le dos, dont une traîne brodée plissée en éventail qu’il tirait à pas loin de 5 mètres derrière lui ! Donc, il se mettait bras écartés comme un épouvantail et les bonnes soeurs le recouvraient peu à peu de je ne sais combien de couches, avec à chaque fois des rangées de boutons à fermer un par un…
C’est d’ailleurs ça qui a mis fort regrettablement un terme anticipé à ma prometteuse carrière de prélat : je suis HORRIBLEMENT claustrophobe, et la Sainte Liturgie en marcel et bermuda + ou – collant, ça la fout mal !
La Sainte Église Orthodoxe ne sait pas ce qu’elle a perdu, làààà.
Bon, le Petit Larousse ne fait pas mention de cette chappe-là, mais il m’aura au moins appris qu’outre une volaille castrée, un « chapon », c’est aussi un croûton de pain aillé…
Je mourrai moins idiot.
Amin.
T.O.
Moins idiot je ne sais pas, mais moins ignare, oui. Et, chappe pour équivalent de la chasuble ? soit, peut-être, admettons – mais je ne trouve pas ce terme aux dicos divers et variés.
Et la chape « de plomb » : instrument de torture du moyen-âge qui vous écrasait la cage thoracique au fur et à mesure de l’empilement des plaques de plomb sur le torse… sympa, non ? on savait vivre, à cette époque.
Ouaipp, le coup de la chape de plomb, ça je savais ! C’est ce qui m’a fait pas mal m’interroger au moment de l’incendie de la toiture de Notre-Dame de Paris : une toiture EN PLOMB ??? Non compté ce que ça coûterait aujourd’hui et la levée de boucliers unanime de toutes les assoc’ d’écolos, pour un endroit censé abriter l’une des résidence préférées du Paraclet*, ça me paraît un contresens particulièrement… euhhhh… gratiné, disons.
Pour le reste, va-t-on la refaire à l’identique-idem-pareil-commavant la twature, ou bien va-t-on se laisser aller à l’inspiration « pur XXIème » façon Violet-Leduc-Revu-Rézos-Socios ??? Deux remarques à ce sujet : quand il a été question de construire la pyramide du Louvre, y’avait des brouettées de genss’ qu’étaient contre, avec d’excellents arguments. Maintenant, on se demande comment elle n’a pas TOUJOURS été là ? Quant à l’authenticité, pollop ! Violet-Leduc – pour le travail duquel en tant qu’archi moi-même j’ai la plus sincère admiration ! – ne s’y est pas laissé prendre : il a fait une cathédrale comme elle n’avait jamais été auparavant, en particulier du point de vue flèche postiche ! Quant aux gargouilles et autres statues des apôtres – où il s’est fait figurer lui-même ! – n’en parlons pas. Imaginerait-on N.D. sans ses gargouilles aujourd’hui ? C’est vrai aussi qu’à l’époque, on n’était pas obsédé par « l’authentique » (Bien souvent bidon, comme c’est le cas de nos jours !), pour ne rien dire du « bon goût ». Ben oui : partout où il est passé, l’architecte impérial s’est permis quelques petites entorses en guise de signature ; à l’époque ça ne choquait personne et son projet avait par ailleurs l’aval de Hugo ! À ce propos, je viens de voir un excellent reportage sur Hauteville-House, la « résidence » forcée de Victor Hugo à Guernesey : délirant… et superbe ! Or on sait que c’est grâce à lui et à sa fascination pour le Moyen-Âge qu’ont été entrepris les travaux de restauration de la cathédrale, qui jusque là menaçait ruine ! Je crois même qu’il avait lancé une souscription pour, si ma mémoire est bonne… Pourtant, pas mal de gens ignorent encore qu’outre le génie littéraire qu’on sait, Hugo était aussi un dessinateur-aquarelliste hors-pairs (il peignait notamment… avec du café !) et un décorateur de grand talent ! Mais au jour d’à-ç-t’heure, attention où vous mettez les pieds : défense d’exceller dans plusieurs domaines !!! Tout juste acceptera-t-on, si vous êtes pianiste-virtuose, que vous sachiez également faire « la pasta di mamma » comme personne. Et encore…
C’est vrai aussi que le talent – le vrai ! – est devenu tellement rare que ceux qui s’en estiment ne serait-ce qu’un chouïa détestent qu’on viennent chasser sur leurs terres !
Ahhlàlà, on n’en voit pas le bout et c’est pas un beau G-7 dans les meubles de l’Impératrice Ugénie** qu’y changera grand-chose, m’est aviss (Au fait, qui c’est qui paie l’hôtel ? Et les 13.000 flics ??)
Au final, le seul piment de la chose, c’est encore la visite de ces dames à Espelette…
T.O.
(*) Le Paraclet – du grec paraklytis, le consolateur, mais aussi invoqué, invoquer, auprès, et, appeler – c’est ce vent léger de l’esprit qui descend sur les apôtres à la Pentecôte ou volette après toutes sortes de catastrophes telluriques dans le livre des Rois (I Rois XIX, 9 à 13) devant la caverne où s’était réfugié Elie. On imagine mal ce doux zéphyr murmurant écrabouillé sous des tonnes de plaques de plomb…
(**) Nous v’là revenus à notre Second Empire bien aimé et son sens du faste. Au fond, ça n’est pas étonnant que Macron 1er ait choisi ç’t’endroit là pour sa petite garden-party, et ce au détriment de tous les congépés en vacances dans le coin : Sa Majesté reçoit les Grands de ce Monde. Et les prolos, à la niche au « Camping des Flots Bleus », non mais des fois !
Hugo le superbe… dont acte, effectivement j’ai eu à admirer des dessins d’Hugo, outre ses écrits, évidemment incontournables – enfin, pas tous…
Ceci dit, la pyramide Ping au Louvre, je suis largement moins admiratif que vous… transparente mon cul, et terriblement coûteuse d’entretien.
Quant au G7, il fallait bien le faire quèqu’part, non ? et à raison d’un flic pour un manifestant, ça s’est passé sans heurts… heurts pourtant annoncés, programmés, les Blacbloqueurs étant venus exprès pour ça… ça leur aura fait du tourisme, Espelette et la Rhune, l’Irouleguy etc. Evidemment ça ne s’est pas fait sans quelques contraintes… On a le beurre OU l’argent du beurre, en principe ; pas les deux. Ou pas de beurre du tout…
Allons Tibert, ne vous moquez pas de cette amie commune qui, ne vous en déplaise, citait simplement Gaston Bachelard depuis « La terre et les rêveries de la volonté » (1948) : » Tout m’est pâte, je suis pâte à moi-même, mon devenir est ma propre matière, ma propre matière est action et passion, je suis vraiment une pâte première. »
Oups… le vide de mon inculture donne le vertige. Rendons à Bachelard, etc etc…, et à cette stagiaire la pertinence de la citation, puisque c’en était une. Mais le « Tout m’est chape », c’est vraiment de moi.
… Un flic pour un manifestant, z’avez vu ça où Tibuche ? 13.000 flics, ça fait plus de 4 fois la population de ma ville chérie (beurk !) ici, et le droit de manifester, il est inscrit dans notre constitution, non ? En outre, y’avait aussi des « manifestants » espagnols et portugais. Pour une fois que l’Europe se manifeste qqpart, on veut pas d’eux ??? Faudrait savoir, hein!? Ç’t’amusant aussi : on est tenus beaucoup plus au courant des manifs à Hong-Kong qu’à BIARRITZ ou à BAYONNE ! Pourtant, H.K. c’est pas la porte à côté pour aller y faire arroser son parapluie à coup de La Crime, Eugène…
Bof. Enfin, en guise de consolation, j’ai vu hier soir « On ne vit que deux fois » sur tARTE : un Michel ne gache par l’autre ; Audiard servi par Serrault… un régal !
Ouais, bon, je relatais ce qui a été rapporté pour Bayonne : ils disaient, au poste, un flic pour un manifestant. Mais il y avait d’autres flics ailleurs, je suppose…
Quant à Deray / Audiard / Serrault / Rampling, je ne partage pas votre avis : film mou, sans rythme, intrigue filandreuse. De bons acteurs non plus que des dialogues aux petits oignons (quoique Audiard ne se soit pas trop foulé, là) ne peuvent sauver un édifice aussi vaseux. J’ai largué avant la moitié.
Bon. Ben heureusement qu’on n’est pas d’accord sur tout ! Ça serait d’un chiant…