Mort et dinguerie

Depuis Samuel Paty… non, bien avant, en fait, on avait une idée assez claire de la chose, avec les assassinats à Charlie Hebdo – on sait le coût d’un dessin caricatural, d’une supposée offense à un prophète, d’une moquerie, d’une blague mal prise : la mort. La peine de mort a été abolie en France, mais plein de gens n’en ont cure.

Tenez, un entrefilet dont la teneur complète (*) est hélas réservée aux abonnés de Ouest-France : une institutrice aurait négligé de nouer les lacets d’un gamin de sa classe à l’école primaire : elle a été menacée de mort ! Hier, un député conservateur anglais, très chrétien, pro-Brexit, anti-avortement, bref pas ce qu’on appelle un progressiste : assassiné à coups de couteau ! Toujours Samuel Paty : un sondage sur des jeunes révèle que 22 % pensent que le prof décapité avait tort de montrer les caricatures de Charlie. Il avait tort ? c’était un cours sur la critique, iconoclaste, au vrai sens du terme, et l’on pouvait, c’est vrai, critiquer en retour, exprimer son désaccord, se dire offensé… mais la mort ? la mort, la mort, la mort. Menaces de mort, mise à mort, c’est devenu le tarif.

C’est devenu le tarif, et c’est fou. C’est fou, donc hop, en psychiatrie. Ou bien on avait picolé, ou / et pris des stupéfiants… « on n’était pas dans son état normal » . Le type, ex-boxeur professionnel, qui vient de décapiter à mort une septuagénaire non-boxeuse avant d’aller tirer 1.000 euros aux distributeurs bancaires avec la Carte Bleue de la victime : il ne se souvient de rien ! eh oui, des troubles de la mémoire ! ( il se souvenait cependant du code de la carte). Vous verrez, si ça se trouve, il avait abusé des canettes de bière genre 8.7, ce brave homme. Alors, forcément… il décapite, que voulez-vous. Plus au Nord, un expert du tir à l’arc tue cinq passants qui avaient le tort de passer… et donc, on présume qu’il est dingue, ce Danois vivant en Norvège et converti à l’Islam… expertise psychiatrique à venir.

Bref, la menace de mort est devenue le mètre-étalon du désaccord ; en cas de mise à exécution, ça relève alors de la psychiatrie, ou bien on a un mot d’excuse : on avait forcé sur le pinard, le cannabis, le… Il fut un temps où l’on mettait la tête au carré, ou l’on pétait la gueule, où l’on en collait une, maintenant c’est à mort. Les égoûts-réseaux-sociaux y sont pour beaucoup, c’est certain, offrant un anonymat protecteur et désinhibant. Mais pas que ! Il s’agit pour une bonne part des menaçeurs d’une démarche construite et organisée, dont le but est d’inspirer la peur, bref de terroriser. Et ça marche !

Tibert

(*) Même abonné, n’espérez pas savoir un peu précisément qui est cette menaçeuse : il importe de ne pas stigmatiser, n’est-ce-pas. Et puis comme ça on ne pourra pas la menacer de mort…

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