Fringues, barbiers, ongleries

La Fnac des Champs-Elysées – donc sur la « plus belle avenue du monde » , cocorico ! pour ceux qui n’ont jamais mis les pieds hors de Paris – ferme ses portes, comme avant elle le magasin de la Place d’Italie, toujours à Paris. Les patrons avaient prévu de maintenir l’ouverture pour écouler-brader les stocks, mais face aux meutes d’acheteurs agglutinés devant les grilles, ils ont renoncé… bousculades, piétinements, poussées, entassements, il y aurait eu des morts pour obtenir de haute lutte les superbes écouteurs Dent-Bleue intra-auriculaires à réduction de bruit de chez Sam’Soung à moins 30 %, ou autre équipement absolument indispensable.

Les raisons sont simples, et navrantes : la Fnac des Champ’s perdait du fric. Loyer insupportable, frais fixes affreux, et puis ça vendait mal : l’avenue vire irrésistiblement au négoce exclusif de godasses, fringues, sacs à main, parfums, colifichets, affiche tout en anglais, et les chalands sont désormais majoritairement des touristes, plus intéressés à se payer des sacs Air’Mess hors de prix et des croque-monsieur-feuille de salade-soda que des aspirateurs sans fil, qu’on commandera évidemment sur le Houèbe, sans les avoir jamais vus auparavant. Cherchez-y donc une épicerie raisonnable, vendant des denrées du quotidien à des prix à peu près décents : mission impossible. Une crèmerie, boucherie, droguerie ? vous plaisantez.

C’est la vie moderne. Déambulant au long des avenues dans les bourgs de notre beau pays, on peut s’y dégoter des « barbiers » à la pelle ( « barber » , on est mieux tondu), des coiffeurs pour des hordes de dames, des ongleries pour plus d’ongles qu’on n’en aura jamais, des salons de beauté, de remise en forme, de massage, des flopées de vêtements, de grolles, de… mais quant à se cultiver, se nourrir…

Se nourrir : cuisiner, c’est exclu. Mais, voulez-vous du libanais ? du chinois ? du grec ? du halal ? du végan ? une pizza ? des empanadas ? un kebab ? des tacos ? un burger ? des sushis ? des satés ? des nuggets ? un bento ? des wraps ? un burrito ? empoignez votre cellulaire, lancez l’appli « Foude-Bidule-Chouette » : dans 20 minutes montre en main, on sonnera pour vous « délivrer » (vous livrer, donc) le mol et tiède ersatz de bouffe indifférenciée, correspondant grosso-modo au descriptif et à la superbe photo de l’appli. Avec des sachets-plastique de ketchup, de mayonnaise, de vinaigrette, de sel, de… alors, bon appétit ! Et un soda bien sucré, pour roter. Sans oublier le pourboire du coursier.

Tibert

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