Une brève du Figues-à-rôts intitulée « Hymne nazi aux championnats de canoë » m’a interpellé, et ma foi je suis allé voir ça : en effet, ça laissait imaginer une cohorte de mecs forcément virils, des torses nus, des shorts, de la blondeur coiffée en brosse – ou façon crâne d’oeuf – et des bras droits tendus vers le ciel dans la gestuelle « y en a haut comme ça ».
Mais pas du tout, c’était une regrettable erreur du disk-jockey des championnats de canoë, qui passait les vinyls des hymnes sur sa platine. Tenez, voici la teneur de cette information, après correction des fôtes d’ortografe et des coquilles :
« La première strophe du vieil hymne allemand « Deutschland über alles » (L’Allemagne au-dessus de tout), qui n’est plus chantée depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, a retenti par erreur après la victoire du duo allemand Knorr-Niche lors des Championnats du monde de canoë-kayak en Hongrie.
L’entraîneur fédéral (…) s’est déclaré « horrifié » par la confusion entre l’hymne que chantait le pouvoir nazi et l’hymne actuel de la République fédéral allemande. En 1952, la nouvelle république a en effet décidé de garder la musique de l’hymne, mais de bannir définitivement les deux premières strophes, très controversées. »
D’abord, la musique de l’hymne, c’est un mouvement adagio d’un quatuor de Joseph Haydn, excusez du peu. Je suis bien d’accord, ça vaut le coup de garder la musique, qui est superbe, tout simplement.
Mais que disent-ils donc, ces vers honnis des deux premières strophes aujourd’hui supprimées de l’hymne allemand ?
L’Allemagne, l’Allemagne avant tout,
Par-dessus tout au monde,
quand constamment pour sa protection et sa défense,
fraternellement elle est unie.
De la Meuse jusqu’au Niémen,
de l’Adige jusqu’au Détroit,
L’Allemagne, l’Allemagne avant tout,
Par-dessus tout au monde !
……
Femmes allemandes, foi allemande,
Vin allemand et chant allemand
doivent continuer dans le monde
de résonner avec leur ancienne beauté,
de nous porter à agir avec noblesse,
tout au long de notre vie.
Femmes allemandes, foi allemande,
Vin allemand et chant allemand !
C’est clair, les limites territoriales sont largement excessives et expansionnistes. Et puis « femmes allemandes » – ach, schöne gretschen… – , c’est sexiste et con ; quant au vin allemand, pas mal, pas mal, il y a de très bonnes choses, des Auslese délicieux, mais je préfère les nôtres – à consommer avec modération, bien évidemment.
Enfin, le troisième couplet, le seul qu’on chante de nos jours, le voici :
Unité, justice et liberté
pour la patrie allemande !
Cela, recherchons-le,
en frères, du cœur et de la main !
Unité, justice et liberté
sont du bonheur les fondations ;
Fleuris, dans l’éclat de ce bonheur,
Fleuris, patrie allemande !
On pourra utilement rapprocher ces textes gentillets de notre « qu’un sang impur abreuve nos sillons« , des « féroces soldats » qui mugissent, des fils et des compagnes qu’on égorge, et du souhait « que tes ennemis expirant voient ton triomphe et notre gloire« .
Au finish et dans le sanglant, y a pas photo, comme on dit : on gagne haut la main.
Tibert