Le « Monde-sur-Toile » et les autres canards réputés sérieux dissertent là-dessus : ça fait 10 ans qu’on a l’Euro, et « 10 ans après, l’Euro reste associé à une perte de pouvoir d’achat« , dixit justement « Le Monde« . Et de citer notamment le petit noir, qui se négociait 4,50 à 5 Fr grand maximum sur le zinc, à rapprocher de 1,50 euro = 10 Fr !(*), soit le double en 10 ans. Et de se couvrir la tête de cendres, car « Le Monde » a peu d’affection pour l’Euro – c’est une litote, et ne manque pas une occasion de le débiner.
Le même canard titre, d’ailleurs : « La croissance allemande a bénéficié de la monnaie unique« . Ben alors,c’est bon ou mauvais ? il faudrait savoir… bon pour les Allemands, pas bon pour nous ? c’est ça ?
Eh oui, c’est ça. Et moi j’en ai par dessus la tête d’entendre seriner tous les jours l’antienne « avec le Franc, au moins, on maîtriserait notre destin, on serait pas gênés aux entournures comme avec l’Euro gnagnagna ». Nous ne maîtriserions rien du tout ! nous étions, jusqu’à la mise en place du « serpent monétaire » SME en 83, les rois incontestés – avec les Italiens, c’est vrai – de la dévaluation de notre monnaie. Dix-sept dévaluations entre 1028 et 1983. Un courant d’air ? on dévaluait. Nos industriels frileux et craintifs pleurnichaient qu’ils n’y arrivaient pas ? on dévaluait. Les caisses sonnaient creux ? on dévaluait. On dévaluait à tout propos et hors de propos, parce que nos gouvernants sont des paniers percés, parce que la Grandeur de la France, parce qu’on dépense trop et connement, parce qu’on ne sait pas bosser sans rouspéter, parce que notre pays est piloté en fonction des états d’âme des chauffeurs de taxis, des aiguilleurs du ciel, des patrons chauffeurs-routiers et des agents de conduite SNCF et RATP.
On en a vu, des reculs du Franc par rapport au Franc Suisse, au Mark, au Florin, au Franc belge, même le Franc belge, c’est dur, hein ?… on en a vu, et chaque fois c’était une baffe et une mortification : pas sérieux… monnaie de singe… pas capables de bosser sans râler… gaspilleurs… cigales… sous De Gaulle sous Pompidou sous Giscard sous Mitterand, on en aura vu défiler des dévaluations – des humiliations.
Depuis le SME, en revanche, il n’y a pas eu une seule dévaluation – si, en fait, les taux de change sont maintenant à la baisse vis à vis du Franc suisse depuis 2011 – la suisse, ce paquebot de banques ; vis à vis du Yen depuis peu – injustement, au vu de la santé de l’économie nipponne et de sa dette souveraine ; et vis à vis du Dollar, cette monnaie de singe planétaire. Mais songeons-y : si l’on avait gardé le Franc, où en serions nous dans la dégringolade vis à vis du Mark, du Florin, du Franc belge, du Yen, du… ? hein ? au ras des pâquerettes. Si la monnaie négative existait, nous y serions déjà.
Et en cas de malheur – de retour au Franc, je vous fiche mon billet de 100 qu’une des premières décisions qui seront prises, ce sera une dévaluation : « compétitive », pour la bonne cause, je vous rassure tout de suite.
Tibert
(*) J’ai fait un rapide calcul : 9 centimes de café maximum par dose (6 grammes) à la machine derrière le comptoir. De l’eau, un peu d’énergie, disons 2 centimes le tout : coût de production, moins de 11 centimes. Après une petite translation vers le comptoir : 1,50. Vers la salle : 2, voire plus.