Cet article dénonciateur du Monde – quel éclairage opportun sur les pratiques banquières, à l’heure où certains boursicoteurs, ceux qui passent leur temps à acheter et revendre des actions en espérant ainsi « monter l’escalier » boivent la tasse (*) – nous livre une image ma foi cocasse et plaisante : le « système de la carotte et de la carotte » ; entendons par là, pour ceux qui ne prendront pas le temps de lire cet article, que les banquiers américains se payent des salaires royaux quand ça va bien, et des salaires royaux quand ça va mal. Ceci, bien évidemment à contre-courant de la morale libérale traditionnelle.
L’article en question se lamente aussi sur la fuite des meilleurs sujets vers les carrières financières, jugeant fort dommageable pour les autres branches de l’activité humaine cet engouement pour la banque.
Voilà qui éclaire d’un jour cru la difficile réalité du marché du travail, et la pénurie chronique d’artisans : s’il y a si peu de plombiers, de maçons, de platriers, de couvreurs, d’ouvriers-patissiers, de tourneurs-fraiseurs… c’est qu’ils sont tous allés bosser dans la banque. Fuite des cerveaux, oui, mais aussi des truelles, des niveaux à bulle, des poches à douille, des trusquins et des pieds à coulisse.
Symbolique, la carotte ! Pour la finance, il y avait déjà le blé, les radis, l’oseille… les financiers sont donc à tort montrés comme des requins, sauf à les supposer végétariens.
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(*) L’actionnariat consiste en principe à investir durablement (donc à participer au capital ) dans une ou plusieurs entreprises que l’on juge intéressantes, performantes, prometteuses. On est très loin, dans les pratiques boursières actuelles, de cette conception pépère, morale et naïve.