Voyage au debout de la nuit

La Nuit debout  ? c’est pour moi – avec des minuscules, ne nous prenons pas la tête – un bout de nuit à « partir en piste », vaguer et puis par exemple refaire le monde, accoudé au zinc d’un bar, « devant la bière allemande« . La nuit debout, c’est ce très beau poème chanté de Léo Ferré, « Monsieur Richard » :

Les gens, il conviendrait de ne les connaître que disponibles
A certaines heures pâles de la nuit
Près d’une machine à sous, avec des problèmes d’hommes
simplement
Des problèmes de mélancolie
Alors, on boit un verre, en regardant loin derrière la
glace du comptoir
Et l’on se dit qu’il est bien tard…

Ils regardent loin loin derrière la glace biseautée du comptoir, les habitués des Nuits debout, et c’est ma foi sympathique et rassurant  de voir comme il est possible et profondément démocratique de libérer la parole nocturne (sauf que Finkielkraut s’y est fait insulter et jeter hier soir ; la place de la République n’est pas ouverte à tous et la démocratie s’y montre très orientée ; on n’est pas prêt à y entendre des voix dissonantes, vive l’unisson, c’est plus simple). Reste à trouver, entre deux nuits et plein de cafés, le temps de dormir un chouïa, militer, tracter, coller des affiches, préparer des banderoles, participer aux réunions, quand il ne s’agit pas pour certaines chapelles plus radicales de confectionner des cocktails inflammables et de s’approvisionner en barres de fer et en cagoules, pour aller à certaines heures pâles de la nuit casser des vitrines, allumer des poubelles, exploser des abribus, affronter des flics las de leur nuit, justement, ces flics qu’on avait acclamés et remerciés au lendemain des attentats de Charlie. Va comprendre…

Va comprendre… les gens, il conviendrait de ne les connaître que disponibles, c’est à dire hors de leur formatage politique, de leurs techniques d’entrisme et de leurs solutions téléphonées : « grève générale », « étudiants-travailleurs », eux qui pour beaucoup n’ont jamais mis les pieds dans une boîte. Et l’on invoque, la nuit, debout,  la « convergence des luttes », et l’on convoque la Sainte Grève Générale, et l’on rejoint des deux pieds les « justes revendications » des cheminots SNCF, ces damnés de la terre 😉 …

Le tout sous les yeux attendris de madame Taubira, qui dit sa profonde joie, et des journaliste du Monde, qui boivent visiblement du petit lait. Et ça invoque les mânes, ça ranime la flamme. Esprit de Mai 68 es-tu là ?

Tibert

 

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