J’en ai plus que marre de la « phobie ». Machin-phobie ? c’est la crainte, la peur de Machin. La crainte maladive, irraisonnée, disent certains. Mouais… irraisonnée sans doute s’agissant de l’agoraphobie ou de l’arachnophobie, si l’on excepte les énormes mygales velues. Mais pas partout. Il est des phobies fichtrement fondées, par exemple celle du feu, ou des espaces clos, confinés, la claustrophobie. Mais sur cet article du Monde, qui traite des péripéties mouvementées d’une campagne d’affichage pour la prévention du SIDA, et dans la même dérive du terme que l’illustre islamophobie bien connue, on nous veut nous balancer l’équation phobie = haine. Haine agissante, haine démonstrative, qui plus est – d’ailleurs à quoi pourrait servir une haine muette ?
Haine ? pas du tout ! pas du tout. Certains maires ont fait ôter des affiches de la campagne anti-SIDA dont je vous cause, parce qu’ils ont jugé qu’elles pouvaient choquer, perturber de jeunes âmes. Et hop, les voilà qualifiés d’homophobes (*) – dans le sens « qui haïssent les homos ». Mais en quoi est-ce une manifestation de haine ? On peut comprendre que les assoces anti-SIDA soient déçues que leur campagne soit mal perçue, mais se sont-elles interrogées sur la pertinence et l’innocuité de ces affiches ? a contrario, faut-il accepter tout ce qui émane du milieu homo pour la seule raison que ça vient de lui ? c’est assez similaire à la question qui se pose à une femme draguée par un homme « de couleur », comme on dit : a-t-elle le droit de le rembarrer, parce qu’elle n’a pas la tête à ça, parce qu’il ne lui plaît pas, ou toute autre raison ? alors c’est au risque de se faire traiter de raciste.
Voilà donc en gros le marché qu’on nous soumet : si vous n’êtes pas pour nous vous êtes contre nous. Ben non, ça ne fonctionne pas comme ça. Ne me demandez pas si je suis colombophile ou colombophobe ; ni l’un ni l’autre ! les colombes, je les côtoie sans problème et bien volontiers – du moment qu’elles ne me bouffent pas mon oxygène et ne cherchent pas à m’enrôler chez leurs groupies.
Tibert
(*) et non pas « gayphobie », et toc. C’est du grec, pas de l’anglais.
PS – Une lectrice m’interpelle : Si elle me suit bien, ces affiches anti-SIDA me choquent ? ce n’est pas la question (personnellement je trouve les photos assez bénignes, les textes nettement plus discutables, mais rien de pendable) : j’explique dans ce billet que je déteste qu’on me somme d’aimer, sous peine d’être …phobe.
Ouais. Je me demande si cette façon de qualifier de « phobie » tout ce que l’on n’aime pas vraiment n’est pas l’ultime manifestation de la foutue – pardon, fâcheuse… – habitude bien française de tout étiqueter et classer. Ce qui avait peut-être bien un sens encore à l’époque des Lumières et de Pic de la Mirandole mais qui aujourd’hui, à la faveur d’une obscurité (à tous les sens du terme…) tout aussi propice que soigneusement entretenue, conduit à des schématisations de « pensée » qui trouvent leur apogée avec le développement de ces « I like » ou « I dont like » dont certains réseaux sociaux font leur choux gras… et qui propulsent en moins de temps qu’il ne faut pour le dire à des sommets de gloire de célestes inconnus dont personne n’avait la moindre connaissance auparavant. Suivez mon regard de l’autre côté de l’Atlantique si vous vous êtes perdu en route.
A ce sujet précis, Fesse-bouc porte une très lourde responsabilité, en particulier – Zuckerberg l’a lui-même reconnu… – dans l’élection surprise de S’Trumpf (fallait se méfier, aussi : en allemand, « stumpf », ça signifie « épaté, émoussé » ; le contraire de scharf, « aigü, pointu ». Épatés, ils l’auront tous été au delà de toute mesure ; les média au moins autant que leur acolytes les instituts de sondage ; ici autant que là-bas!! Bon, c’est un peu capillotracté, je vous le concède, mais si on peut plus rire…)
Bref : maintenant – et le développement du Net n’y est pas pourre rien -, on ne réfléchit plus, on classe et quand ça devient compliqué, on se fie à des « algorithmes » ténébro-fuligineux dont je ne cesse de me demander qui peut bien les concocter, et surtout en vertu de quels obscurs principes…
Anecdote : aux tous débuts de l’informatique, je me suis demandé d’où pouvait bien nous débarquer cet outil, encore balbutiant mais dont – eeeh oui… – j’avais déjà deviné à la fois la puissance autant que la nocivité potentielle, suivant les mains entre lesquelles il tomberait. Or un détail m’a tout de suite frappé : l’informatique fonctionne suivant un mode de calcul binaire ; c’est à dire une série de « 0 » et de « 1 » dont la combinaison à perte de vue permet d’énoncer les chiffres les plus complexes. Des chiffres, et rien d’autre : pour une bécane, aussi performante soit-elle, tout est question de « 0 » ou de « 1 », de « oui » ou de « non », de « noir » ou de « blanc », etc. Autrement dit, le mode de calcul des ordis consiste à diviser toute réalité en deux, puis en deux encore, puis encore en deux, etc. etc… jusqu’à l’émiettement final… et même après.
Vous souvenez-vous de comment on dit « je divise » en latin ? « Diabolo » : « … je divise, je jette de part et d’autre… »
Dans les textes anciens, le démon est d’ailleurs souvent appelé aussi « le diviseur »… Donc, stricto sensu, le mode de calcul des ordinateurs est parfaitement « diabolique » au sens premier du terme, et ses « I like » ou « I don’t like » ont tout à fait de qui tenir !
Allez, dormez tout de même sur vos deux oreilles : la droite et la gauche. (Prouesse extrêmement difficile à réaliser pour tout individu normalement constitué, soit dit en passant…)
@ + !
T.O.
Et encore « I don’t like » (pouce vers le bas) n’existe que depuis quelque temps. Au début on devait « liker » (quelle horreur !) pouce en haut, ou se taire. Un peu le genre de dilemme devant lequel nous place la communauté homo militante, en somme. Et puis il manque clairement le bouton « je m’en tape ». Proposons une icône dans ce sens ?
Erreur, avec des cellules-mémoire à trois états (ça existe maintenant) on aurait pu faire des ordinateurs à base 3 au lieu de 2. On y aurait gagné dans le mode ternaire…
Allons bon ? Et pourquoi qu’on l’a pas fait, alorsss ? Remarquez qu’avec le mode « ternaire », on passait du diviseur à la Ste Trinité, avec tout le Vatican derrière !
Au fond, pas certain qu’on y aurait vraiment gagné…
Pour les mémoires, on avait les tores de ferrite, l’époque héroïque (voir https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9moire_%C3%A0_tores_magn%C3%A9tiques) avant qu’on sache utiliser les semi-conducteurs. Les tores, on devait les « rafraîchir », car lire leur contenu (magnétisé + ou – , donc 0 ou 1) l’effaçait ! Deux états, 0 ou 1 et basta, et tout s’est bâti à partir de là, 001111010010001101 etc, et comme ça fonctionnait tout à fait correctement, on a continué. Mais je donne dans la pédanterie, là. Et puis le ternaire c’est bon pour la valse, la java…
… Tenez, une autre piste à propos de ce que je développais ci-dessus dans le billet de Ch. Sannat dans « Insolentiae » d’hier, 24 novembre…
… Merci du renseignement, Tibert ! Mais si je comprends bien, z’êtes aussi vieux que moi ???
Il me souvient que dans le courant des années 60 (je n’ai plus la date exacte en tête…) la Sté (la seconde ou la troisième du monde dans sa branche, à l’époque) pour laquelle mon père bossait s’est équipée d’un superbe IBM qui tenait la place d’une honnête salle à manger… climatisée. Comme elle était la première à sauter le pas dans le Nord (Tourcoing), ça a donné lieu à une petite cérémonie, avec journaleux, télé, vin d’honneur et tout le toutim. Ces messieurs s’en sont donné à coeur joie en mitraillant « à bout portant » avec leurs appareils-photo les racks grands-ouverts où tournaient les bandes magnétiques avant la démonstration du matos par qqs ingénieurs de la maison en costume-3-pièces et cravate…
Première question posée à l’ordi (il ne me souvient plus de quoi, mais j’y étais !)… ronron… après quelques secondes de suspens insoutenable, l’énorme imprimante crépite, le papier (à trous…) défile ; l’un des ingénieurs arrache la feuille qui sortait… et on le voit sensiblement verdir. Il froisse nerveusement la feuille et déclare, d’une voix nettement moins assurée que la première fois et avec l’accent du Connecticut : »Nous allons recommencer. Je crois il y a eu un petit erreur de saisie… »
Bref, ça a duré une demi-journée ; les journalistes étaient rentrés chez eux, les ingénieurs d’IBM avaient troqué leurs 3 pièces contre la blouse blanche et tout le monde courait dans tous les sens avec un air affolé, au milieu des entrailles de la machine. J’avais voulu rester avec mon père « pour voir » mais j’avoue que ça commençait à m’agacer : tout semblait en ordre et pourtant rien ne marchait correctement ; tout avait été vérifié et revérifié, mais R.A.S…
C’est à ce moment que j’ai eu le coup de génie de ma vie (j’avais seize ou dix-sept ans et jamais, jusque-là, vu d’ordinateur ailleurs que dans les colonnes de « Science & Vie », à l’époque…)
« S’cusez-moi, Messieurs… Mais si vous avez tout vérifié et que tout marche… sauf la machine elle-même, est-ce que vous avez vérifié que les données sur lesquelles elle tourne sont les bonnes ? »
Je vous dis pas les regards auxquels j’ai eu droit !!! Jeune bleu-bite ! de quoi qu’on se mêle ?????
Néanmoins, le patron de la boîte et de mon père – c’est lui qui payait tout ce mic-MAC ; Noël F. , un homme merveilleux qui commençait à douter du bien fondé de son idée… – m’emboîte le pas et décrète : « C’est la voix du bon sens. Vous avez tout vérifié… sauf les bandes magnétiques ! Changez les bandes, on verra bien ! » (Iui parlait nettement mieux anglais que les américains le français. C’est ça la classe !)
Je vous passe le détail ; il a fallu non seulement changer les bandes – et donc en rechercher auprès de la maison-mère, qu’était pas la porte à côté -, mais aussi… reprendre complètement les saisies ! Ca a demandé pas loin d’une semaine. Je n’ai pas assisté au redémarrage de l’énorme bécane (j’étais encore au lycée, moi…) mais miracle : TOUT A FONCTIONNE NORMALEMENT !!! (pardon pour les accents qui manquent)
Je vous dis pas comment mon père a biché pour son fiston !!!
Esspication : Les bobines avaient été photographiées de très près, rack ouvert, au…. flash ! Or, lorsqu’un flash de l’époque fonctionnait, il dégageait pendant une fraction de seconde… la même énergie qu’une BB de la SNCF (ah, les BB !!!) lancée à pleine vitesse, avec le champ magnétique idoine ! Lequel champ avait effacé ou perturbé au moins partiellement les enregistrement sur bande.
Ce fut ma brève heure de gloire : un lycéen de Roubaix (et pas un crack en maths, je vous l’assure…) avait mouché les ingénieurs amerloques : je vois encore le titre rigolard du canard local ! Même Science & Vie en a parlé. La gloire, je vous dis !
Eh ben vous savez quoi ?? IBM ne m’a même pas offert un porte-clef pour avoir sauvé sa réputation !!!
Ahhhh, monde impitoyable de l’informatique, je ne faisais que te découvrir…
Vous verrez mon âge sur ma page Fesse-bouc, si un jour de faiblesse mentale je m’inscris à ce machin. Et, oui, l’histoire de l’informatique est truffée de ces anecdotes héroïques. La clim’ dans les salles-machines fonctionnait par soufflage d’air froid au travers de bouches ménagées dans le faux-plancher, dalles de 60 x 60 cm qu’on soulevait à l’aide d’une ventouse… la ventouse des salles-machines était aussi indispensable, vitale même, que le tire-bouchon dans une cave à pinard : en soulevant la bonne dalle, on pouvait mettre au jour la « cave », justement, la réserve de bouteilles tenues au frais. Mais tout ça est bien fini, maintenant les « data centres » sont déserts et il faut un badge pour y pénétrer.