Citation de l’administration française : « L’incitation à la haine, à la violence ou à la discrimination est le fait de pousser par son attitude des tiers à maltraiter certaines personnes, en raison de leur origine, de leur religion, de leur sexe ou de leur orientation sexuelle » (*) .
Et voilà, en une phrase, mises sur un même pied la haine, la discrimination et la violence ! la violence, on sait tous ce que c’est, et la maltraitance aussi, au prétexte de l’origine, de la religion, du sexe ou de l’orientation sexuelle. C’est condamnable, sans discussion. Mais – laissons la discrimination pour plus tard – quid de la haine ? de l’incitation à haïr « en raison de gnagnagna… » ?
Et d’abord, qu’est-ce qu’haïr ? keskhahir ? détester, éprouver une aversion profonde. Exemple, Jules Laforgue et Juliette Gréco semblaient détester les dimanches : « Je hais les dimanches » , chantait cette dernière. Eh bien, il y a toujours autant de dimanches, et aussi nuls ! cette haine n’influait que sur les choix de vie de feue Gréco : une haine inoffensive à la société. Idem, des tas de haines, recuites ou pas, restent cantonnées à ceux qui les éprouvent. Moi, tenez, je hais les talcs-chauds oiseux du soir tard (**), à la télé, où des animateurs bourrés (de bons mots), excités comme des poux, échangent des propos creux et complices, des piques et des compliments, avec une brochette de gens plus ou moins connus, plus ou moins utiles, le tout dans une ambiance de marrade obligatoire à tout propos. Le résultat de cette haine, c’est juste que je ne regarde jamais ces âneries, voilà tout.
Et donc, quid de l’incitation à la haine ? Si je dis à un ami : « Robert (***), tu devrais haïr PTMP, ce talc-chaud putassier et bas-de-gamme » … c’est littéralement de l’incitation à la haine, vraie de vrai. Si je suis persuasif, l’animateur de PTMP va peut-être perdre encore un téléspectateur, mais son émission, son intégrité physique, sa famille, ses proches… ne sont pas menacés, que je sache ; mon ami n’est pas un violent. Et puis zut, on modifiera l’émission pour qu’elle soit moins nulle, si des dizaines de milliers de Lucien s’abstiennent de regarder PTMP.
Maintenant, haïr et inciter à haïr des individus « en raison de leur origine etc etc… » c’est stupide et moralement condamnable – ou alors il y a d’autres raisons, pertinentes, et nous dirons alors que ce sont des individus haïssables, j’en connais. Mais où est le délit ? haïr n’est pas agir, même pas projeter d’agir. Tout ça pour constater que la loi condamne « L’incitation à la haine... » , qui pourtant n’extériorise que du ressenti, aucune violence. En somme, « ne haïssez pas » , nous enjoint-on. C’est toujours cette injonction à aimer, à « liker » comme ils disent. Je hais « liker » , terme laid et grimaçant : c’est sûrement condamnable.
Tibert
(*) Oui, enfin, il y a tout de même des orientations sexuelles répréhensibles, voire haïssables, je peux citer les pédophilie, nécrophilie, zoo… toutes « philies » , et non « phobies » , et contraires à la loi, eh oui.
(**) Le soir tard, c’est la suite du soir tôt, alias « prime time » en franco-rosbif. Mais le soir-tôt ou le soirtôt n’ont aucune chance de faire carrière, vu que c’est simplement du français vaguement adapté. Le Prime Time, en revanche, ça a de la gueule !
(***) Pour éviter les représailles de PTMP (PTMP-phobie), Robert n’est pas Robert. Jeu : trouvez son vrai prénom, grâce à un indice dans le texte.