Diffamer une religion nuit gravement

Un lecteur assidu de mes petits billets me signale un fait qui est passé plutôt inaperçu dans l’actualité actuelle (je sais, « actualité actuelle », c’est un pléonasme ; mais moi j’appelle ça une chouette redondance du discours, doublée d’une allitération) . On sait que l’ONU est un « machin » (merci mon Général) qui vote des résolutions, résolutions suivies d’effet ou pas, c’est selon… par exemple toutes les résolutions critiquant le rôle d’Israël dans le conflit Israélo-Palestinien sont lettres mortes, les USA y mettant systématiquement leur véto. Autant pisser dans un violon ! Dans d’autres cas (Corée du Nord, ex-Yougoslavie) c’est la Russie qui bloque tout. Bref ces résolutions ont des succès variables, c’est clair.

Mais en l’occurrence, aucun pays n’ayant mis son véto, la résolution dont je vous entretiens a été adoptée par 23 voix pour, 13 contre, 11 abstentions. Pour, entre autres : la Russie, la Chine, Cuba, le Pakistan ; contre, entre autres, l’Union européenne, la Suisse… Il s’agit de religion, je cite une des sources, et une autre, légèrement différente :

« Le Conseil [ des droits de l’homme de l’ONU ]  a adopté d’autre part une résolution sur la lutte contre la diffamation des religions dans laquelle il se déclare profondément préoccupé par les tentatives visant à associer l’islam avec le terrorisme, la violence et les violations des droits de l’homme.

Il engage instamment les États à prendre des mesures énergiques pour interdire la diffusion d’idées et de documents racistes et xénophobes visant toute religion ou ses fidèles, qui constituent une incitation à la haine, à l’hostilité ou à la violence raciale et religieuse. Il a aussi adopté une résolution portant sur l’élimination de toutes les formes d’intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction. »

La deuxième source diffère légèrement, mais surtout nous informe que des tas d’ONG ont fait campagne pour que cette idée de condamner toute « diffamation des religions » soit combattue ; en fait c’est l’OCI – Organisation de la Conférence Islamique – qui ramait pour faire aboutir ce texte. Les ONG, elles, énoncent – ce qui tombe sous le sens – que c’est l’homme qu’il faut protéger, pas les religions.

Ce texte, non contraignant légalement, énonce qu’il est condamnable de diffamer une religion.  Diffamer ? du latin di-, privatif, et fames, renommée : diffamer, c’est littéralement « porter mauvaise renommée ». Il est donc répréhensible de nuire à la renommée, à la réputation d’une religion. Donc de la critiquer, ce qui nuit évidemment à sa réputation.

Texte qui nous dit aussi :critiquer une religion, c’est être raciste ou xénophobe ! En somme, religion = nation = race !  Et « raciste », c’est l’injure suprême, le top de l’infamie.

Voilà qui ouvre des horizons, ou plutôt qui les bouche bien. La liberté d’expression n’a qu’à bien se tenir.

Mais en matière de répression de la « diffamation » des religions, rien n’est nouveau sous le soleil : Marx (Karl, pas Groucho), dans un texte intitulé « Critique de la philosophie du Droit de Hegel » – février 1844 –  énonçait que « Elle [ la religion ] est l’opium du peuple« . Ce n’est pas de la diffamation, ça ? Allez savoir s’il ne ferait pas aujourd’hui l’objet d’une ferme condamnation de l’ONU, voire d’une fatwah ? en tout cas, la revue où ce texte était publié fut interdite en son temps en Allemagne et en Autriche, et les auteurs poursuivis. On n’a pas beaucoup progressé…

Action-réaction

Tiens, j’ai appris ces jours-ci un nouveau mot. Sur un panneau de chantier du bâtiment, parmi la liste des lots et des sociétés et corps de métiers impliqués, « températion » : avec la plomberie. Joli, non, températion ? au lieu de chauffage/climatisation. Plus court, simple, clair. Températion, tu me plais.

Bon, on n’est pas là pour  tempérer, mais pour écrire sur des sujets qui en valent la peine. Des sujets qui fâchent, donc !

Par exemple, Sartre et Céline, les deux frères ennemis de la littérature française, avaient tous deux compris l’importance de l’image, du look, comme on ne disait pas, le mot n’existant pas à l’époque, sauf chez les Rosbifs. Tous deux vêtus de peaux de bêtes, immuablement : Sartre, l’ « agité du bocal »,  avec son éternel gilet marron clair mi-tricot, mi-suède, Céline avec son mouton retourné sans manches tout mité, sale et débraillé, sur un pull sans âge ni couleur. Nos vedettes littéraires, par delà leurs différends, se rejoignaient sur la gestion de leur image ; à croire qu’ils avaient le même agent.

Des agents, tiens, parlons-en ! Trop d’agents, se dit-il dans les canards, trop de flics, de keufs, en parler-cités. Chaque fois que Maître Nicolas Le Petit se déplace – et qu’est-ce qu’il peut se déplacer ! – des nuées de flics, une marée de cars de flics, le centre-ville bouclé, la ville quadrillée, la thrombose en ville. Dernièrement, hier donc, Chatellerault : ficelée, Chatellerault ! camisole de force. Et les râleurs de râler : ouais, pour qui il se prend ? mais qu’est-ce qu’il se permet, ce petit monsieur, déni de démocratie, mégalomanie, état-policier, tout ça… on arrive même plus à lui envoyer des oeufs pourris et des tomates sur sa bagnole, on peut même plus le siffler d’assez près, le conspuer de visu, l’approcher pour l’invectiver, lui mettre nos pancartes insultantes sous le nez…

Faudrait se montrer un poil logique : ou bien on pratique la démocratie pacifique, visites policées et consensuelles genre René Coty – ou Vincent Auriol, ou un inaugureur de chrysanthèmes quelconque – sans autre enjeu que de faire le guignol, et alors on peut lui toucher le bas du manteau, lui serrer la paluche, crier Vive la France, Vive Vincentauriol, dans une ambiance pépère, sous une surveillance policière légère et bon enfant… ou bien chaque fois que Sarko se déplace, des milliers de « démocrates de gauche », furieux que ce soit lui qui ait été élu, et qui font une fixation sur sa personne, décident de lui pourrir la visite, de lui montrer combien ils le détestent, à quel point ils lui souhaitent tout le mal possible : et que devrait-il faire, ledit supposé ennemi de la démocratie prétendûment menacée  ?  venir tout seul à poil en robe de bure tel le Bourgeois de Calais ? offrir ses fesses à la foule pour se faire botter le cul ? serrer stoïquement les dents sous le déluge de tomates pourries, tout en marmonnant dans sa barbe « cassez-vous, pôv’ cons » ?

Bon, bref : si tous les « démocrates » lanceurs de cocktails-molotov et de pavés renonçaient à leurs projectiles, leurs insultes… éventuellement, peut-être, allez savoir… qu’on n’assisterait pas à de tels déploiements policiers. En somme, pour faire simple : il s’agirait de démilitariser, des deux côtés !

Les prix Y'a good

On nous annonce qu’un jury d’humoristes et de personnalités a décerné des « Y’a bon awards« , parodie supposée récompenser / stigmatiser les Français les plus racistes. Les Français racistes BLANCS, évidemment.

Deux remarques :

– Ni M. Dieudonné, humoriste pas blanc, ni M. Domota, pas blanc non plus, grand chef de la récente grève en Guadeloupe et auteur de remarques douteuses sur les « békés », n’ont été primés. Ils auraient largement mérité de concourir.

– « Y’a bon » c’est du français parodique, du colonialisme daté en béret et baguette de pain. « Awards » c’est du Rosbif. Qu’est-ce que c’est que ce salmigondis ? « Les prix Y’a bon », « Le grand Prix Y’a bon », « les Césars Y’a bon », ça ne le ferait pas ? ce serait trop français ? ça ne fait pas assez branché ?

Après le sommet, ça descend

« Alain Bashung était au sommet de son art« , nous balance-t-on dans un vibrant hommage (*).

D’abord, on n’aurait pas eu droit à ce genre de littérature si Bashung était toujours de ce monde. Le journaleux aurait trouvé totalement inintéressant de nous tartiner un article sur Bashung.

Donc, premio : si l’on vous tartine des hommages, dites-vous que c’est posthume.

Deuxièmo : « au sommet de son art » ? vraiment ? il progressait donc encore, Bashung ? ou bien se déplaçait-il « en palier », sur un plateau ? De fait, s’il progressait toujours, il est bien évident qu’il a atteint le sommet de son art… puisque dorénavant il n’aura plus guère l’occasion de l’exercer, son art.

Troisio : C’est le bon moment pour partir et tirer sa révérence, « le sommet de son art ». Après, on ne pourrait que débiner, se répéter, décliner… après le sommet, ça descend. Chapeau, donc, M. Bashung, c’était pile le bon moment pour partir.

Quatrio : Chapeau, justement, et lunettes… exactement le même chapeau que Leonard Cohen. Pile poil. J’ai été frappé, le lendemain des Victoires de la zizique 2009, de la ressemblance scénique entre Bashung et Cohen, le Cohen d’il y a quelques années, tout de même – c’est une remarque élogieuse, je vous le dis, je révère Cohen – mais personne ne s’en est avisé… nous avions notre Leonard Cohen, et ne le savions pas.

Il nous reste l’autre, le vrai, un peu décavé, évidemment, mais la voix est toujours là, et lui ne fume pas.

(*) Vous avez remarqué ? les hommages sont parfois appuyés – sur quoi ? – mais plutôt vibrants : ils  vibrent très facilement. Au point qu’il est interdit à la troupe de marcher au pas cadencé devant un hommage.

"Les libraires tapis

… derrière leur comptoir attendent le client, moroses mais fiers. »

Cette phrase absconse, je vais avoir ici l’honneur et le plaisir de la commenter pour vous, cher lecteur.

[ Je ne dirai rien de la tuerie de Willenden en Allemagne, où un ado de 17 ans a fait 16 victimes violentes, en l’incluant dans le décompte. Je n’en dirai pas rien, mais juste ceci : comme toujours, ce sont des hommes, je veux dire des mâles, qui font ce genre d’horreurs. Merci aux femmes, ça adoucit un  peu ce monde de brutes.]

Donc, muni de mon ordinateur, je parcourais des yeux un blog de libraires, en ce beau matin lumineux de vendredi 13 (on s’en fout, la suite !! ) et je tombe sur un gars qui défend son bifteck, sous le titre « L’éternelle complainte du commerçant« . Ce libraire, donc, discute de la filière du livre, des marges des différents acteurs… ce qui me fait souvenir d’un épisode récent, rue Geoffroy-Saint-Hilaire à Paris (5ème) que je m’en vais vous conter ici, séance tenante.

Nous flânions donc, ma louloute et moi, sur le trottoir de cette rue, et avisons, devant la devanture d’une librairie, un étal de caisses de livres manifestement usagés, bref, de livres d’occasion. Bien rangés, avec le prix au crayon en haut de la page de garde.

Ma compagne et moi fourrageons – nous sommes des fous rageurs – et la voilà qui sort un bouquin ( « Le dieu des petits riens« , de Arundhati Roy), qui visiblement l’intéresse bigrement. Livre en assez bon état, mais pas trop… au prix de 10 euros (*). « Trop cher », dit-elle, et de remettre l’objet dans sa caisse, et de passer son chemin.

« Attends », lui lancé-je, « je vais voir si on peut l’avoir à moins, ça vaut le coup ». Armé du bouquin, j’entre précautionneusement dans la boutique, retenant mon souffle, non par émotion, mais parce que le libraire est en train de fumer un gros cigare, lâchant des nuages de fumée nauséabonde.

– « Ce livre, on peut l’avoir pour 7 euros ? »

(visiblement contrarié, derrière son écran de fumée) – « Je vends des livres, pas des tapis ! »

– « Mais pas de problème, c’est juste une proposition, c’est vous qui décidez, mais à 10 euros vous pouvez le garder. »

Et je sors, je remets le livre en place (je me fais engueuler car ce n’est pas le bon emplacement, paraît-il) et je m’en vais.

De retour chez nous, on a commandé ce livre sur la Toile ; chez « A-notre-zone » ils en avaient d’occasion autour de 5 euros. Il a certes fallu attendre 3 jours, mais on a tenu bon, on s’est occupés comme on a pu 😉

Moralité : il existe un marché du livre d’occasion, et tant mieux : lisons, lisons, c’est bon pour l’intellect. Que la Toile y joue un rôle, tant mieux aussi. Que certains libraires fassent comme si la Toile n’existait pas, tant pis pour eux. Ils ne vendent pas des tapis, soit ! noble objet que le livre. Noble métier que celui de libraire. Mais un livre (que ce soit Les pensées, de Blaise Pascal, ou une quelconque niglerie de chez Arleuquint), c’est aussi – et concrètement – du papier, de la colle, de l’encre, et basta. Et d’occasion, en plus !

(*) Contrairement aux markéteux débiles qui nous abreuvent de 9,99 ou de 14,99 ou de 39,95, les gens normalement constitués – et même les libraires fumeurs de cigares – proposent des chiffres suffisamment ronds.

Apparemment ça interpelle quelque part !

Un article du Figarôt de ce matin (ou d’hier ? ma doué ! m’aurait-il échappé, à mon grand dam ? ) a suscité, à l’heure où je mets sous presse, 593 réactions de lecteurs. Pas 12, pas 52, non, 593. Gros score, et de tous les bords : amis visiteurs de ce blog, je vous invite à en butiner quelques échantillons, à moins que le goût de l’exhaustivité et l’intérêt pour la recherche vous poussent à en analyser l’intégralité. Bon courage, car ça tire dans tous les sens !

Manifestement, donc, l’article n’a pas laissé indifférent. Et qu’énonce-t-il, cet article ? « un quart des enseignants-chercheurs ne publient pas« . Eh oui. La polémique est lancée, c’est à vous.

Moi, personnellement, ça ne me choque pas. Je dis depuis belle lurette (il n’existe pas de lurette moche, à ma connaissance) que publier n’est pas une fin en soi, qu’enseigner est déjà un gros travail, que le Premier Cycle – qui correspond grosso-modo au « bac » d’avant 1968  – le « bac » étant maintenant une peau de lapin, merci les socialos –  n’a pas besoin de pédagogues-chercheurs, mais de pédagogues tout court, que ce n’est qu’à partir de la fin du second cycle que le contenu d’un enseignement peut se nourrir utilement de recherches.

L’article en question ici statue en fait, silencieusement, sans le dire, que les 3/4 des enseignants-chercheurs publient… ce qui est beaucoup ! Ce qui m’aurait plus intéressé, en fait, c’est un indicateur de la qualité de ce qui est publié. Il est clair que publier est, ou devrait être un acte rare : publier, c’est mettre au jour le fruit de recherches, donc de moult heures de travail. Laissons-leur donc le temps de travailler, de chercher. Et je ne suis pas loin de penser, paradoxalement, que moins on publie, plus on est crédible. Sauf que si l’on ne publie rien, on est mauvais, du moins à l’aune des critères en vigueur . Mais disons-le tout net, et à rebours, beaucoup publier, c’est louche ! (*)

Tenez, prenons un exemple : si je ne publie rien, je suis supposé être un mauvais chercheur ? bon… je ne publie rien pendant 20 ans… je suis très très mauvais… bouh qu’il est mauvais. Mais au bout de 20 ans je sors un papier de, disons 83 pages, intitulé « Démonstration de la conjecture de Goldbach » (**). Et ma démonstration, miracle, tient la route (supposons, hein, supposons…) : suis-je toujours un piètre chercheur ? mais je n’ai publié qu’un papier en 20 ans…

De là à prétendre que tous ceux qui ne publient pas sont occupés à chercher la démonstration de la conjecture de Goldbach…

(*) J’ai vu, de mes yeux vu, certains enseignants-chercheurs publier : dans le domaine informatique, en deux coups les grosses, sur la Toile (à l’époque, c’était rustique, et sans images) trouvez 3 articles américains sur les O.S. « temps réel »  et les algorithmes préemptifs (excusez-moi, c’est technique), malaxez le tout, ornez de quelques calculs, coupez par ci, raboutez par là, ajoutez un zeste de votre cru, trouvez une demi-douzaine de références bibliographiques, chapeautez ça par un résumé (un « abstract ») bilingue, mais en Rosbif d’abord, et hop, servez, c’est cuit.

– (**) Un des Graals de la théorie des nombres, un sommet inviolé : « tout entier pair supérieur à 3 peut être vu comme la somme de 2 nombres premiers« . Voilà, c’est à vous, je ramasse les copies dans 20 ans.

Lire, mode d'emploi

Un peu grisâtre, non ?On annonce de belles choses, de superbes avancées techniques (pardon, « technologiques », enflure oblige) dans le domaine de la lecture : le livre électronique, une simple tablette genre écran de portable, d’ailleurs voyez la photo.

Au premier ras-bord, c’est pas mal, ce truc… pouvoir emporter avec soi plein de bouquins, le tout pesant 200 grammes et pas 12 kilos ! pouvoir retrouver quasi à coup sûr, quelque part dans le bouquin qu’on lit, la phrase, le terme, la citation qui nous turlupine, alors qu’avec le papier c’est galère, feuilletage laborieux des pages précédentes et c’est pas gagné.

Mais… au deuxième ras-bord, quand j’aurai fini mon bouquin, je pourrai le revendre ? des clous ! la FNAC ne le reprendra pas. Je pourrai le mettre aux enchères sur I-braie ? pas mèche. Je pourrai le ranger dans ma bibliothèque ? oui, après avoir fait ronfler mon imprimante pendant 250 pages, puis relié le tout pleine peau. Il me faudra un atelier de reliure, tuer quelques chats, un massicot, de la colle, une presse… bref question circulation des livres ça ne s’annonce pas fastoche. Et les vide-greniers à 50 centimes le volume, les bonnes affaires, terminé.

Mais je pourrai quand même en faire une copie élecronique (une sauvegarde, quoi), sur CD, par exemple, et ranger ça sur un ratelier comme mes Dylan et mes Bach ? euh… quand au hasard des après-midis pluvieux je glandouille devant mes rayonnages de bibliothèque, et que je picore un livre, que je m’y replonge ou l’effleure avant de passer à un autre … tiens, un bout de Mort à crédit, Molly la petite anglaise, ou un passage de La vie mode d’emploi, le coup du type qui découpe les aquarelles en puzzles… essayons de transposer…

Allumer mon « ElectronicBook » (un nom anglais, forcément, sinon ça fait pas technique), parcourir les titres déjà chargés… si rien ne m’inspire, je l’éteins et je vais me balader sous la pluie ? ou bien je vais chercher une sauvegarde (recherches dans la CD-thèque), la charger… Ah zut,  » Invalid CRC at 00FFCD5E6FA  stack overflow » ??? recherches laborieuses, forums, FAQ, eh oui et merde, j’ai la nouvelle version 2.4.7.1 du lecteur SonyLips, et la sauvegarde est en version 2.1.3.0 du lecteur SamSungffit, c’est pas compatible ! Faut que je recharge l’ancienne version  du Rideur si je veux me repasser un bout de La musique du hasard… meeeeerdeuu… je laisse tomber, je repars faire un bricolage, il pleut trop, je vais faire la sieste.

Vive donc le papier. Ce truc, en plus, peut-être. Mais comme disait sur le banc la vieille aveugle au Papé dans la version cinoche de Manon des sources : « Non, ça ne remplace pas, César, ça ne remplace pas… ».

La grosse tête

Encore à propos des Chtis, et cette fois ce n’est pas triste, mais juste dommage.

L’acteur / scénariste Dany Boon, une des deux figures majeures – avec Kad Merad – du film « Bienvenue chez les Chtis », qui a eu le succès phénoménal que l’on sait, se propose de boycotter la cérémonie des Cesars.  La cérémonie des Césars, on s’en fout, avec ses « nominés », nos minets en pingouins et et nos minettes en décolletés assez profonds pour qu’on puisse y plonger. Mais ceci dit, ce que dit M. Boon c’est en gros (vous pouvez vérifier) qu’avec un tel succès d’audience son film mérite mieux que des miettes de compressions de chez César.

Si maintenant la qualité d’une oeuvre se mesure au volume de son chiffre d’affaires, alors Visconti Bresson Bergman et Renoir (le fils) sont des nuls…

Par ailleurs, si « Les chtis » se laisse voir avec plaisir, sans ennui, on ne peut pas se taper sur les cuisses en criant au génie. Scénario gentillet, convenu (on les suppose affreux sales et méchants, on les découvre tendres et très vivables), dialogues moyens – on a droit à des épisodes carrément didactiques, le parler « chti » nécessitant des développements circonstanciés, par exemple sur la locution « j’vous dirai quoi », – et de bons acteurs, avec quelques jolies trouvailles, comme la séquence de mise en scène et en condition pour la tendre épouse dans le vieux Bergues, ou le tête-à-tête de la future belle-doche et de sa future bru à travers un guichet de poste. Pas de quoi classer Les Chtis parmi les oeuvres majeures du 7ème art.

Disons-le tout de même : ce succès énorme mérite une mention spéciale, et nos patentés sociologues devraient se pencher là-dessus : pourquoi ce retentissement ? où est le truc ? les talents de carillonneur de Boon n’expliquent pas tout.

En saignants trouveurs

Au moment où de fort nombreux universitaires (« enseignants-chercheurs » ) clament qu’on les dérange, s’indignent qu’on prétende dépoussièrer leur statut et les universités, ce que j’ai pu écrire sur le sujet dans le passé me semble toujours d’actualité, car rien n’a changé, et surtout pas les mentalités. A quoi ça sert qu’on écrive des billets, hein, je vous le demande ? On reprend donc tout depuis le début.

– Enseigner dans le « Supérieur » ne présente pas de grandes différences avec enseigner dans le « Secondaire ». On a des programmes, des plans de cours, on prépare les cours, on enseigne, on contrôle les connaissances… mais, c’est vrai, on fait moins de discipline, on a des effectifs tantôt pléthoriques – un amphi – tantôt squelettiques – 4 pelés pour un cours peu couru. Mais c’est du travail d’enseignement. Très utile, au demeurant. Et demandant des capacités de pédagogue (ça s’apprend, en partie). Mais ça ne justifie pas non plus un statut à part. Une formation plus solide, peut-être ?

– Chercher, c’est une autre activité. Sans exigence de pédagogie autre que la clarté des idées et du propos. Et ça se définit d’abord par un but ! Imaginez le dialogue : « Vous faites quoi (‘que faites-vous’, en français) comme métier ?  – chercheur » … la première question qui vient aussitôt aux lèvres : « Ah, et vous cherchez quoi ? » (‘Ah, et que cherchez-vous ? ‘ en français). Eh oui, la réponse pourrait être « je fais de la recherche sur les migrations des grues en Zambie-inférieure », ou « sur la topologie algébrique des compacts semi-ouverts », ou « sur la partition des ovocytes en milieu anhydre »… bref « chercheur » c’est d’abord un projet, et ensuite, et en conséquence, les moyens et le statut permettant de mener à bien ce projet.

Que certains chercheurs soient de bons enseignants ? c’est bien possible. Que ça puisse les motiver ? pourquoi pas ? mais qu’on cesse de marier de force ces deux activités. Qu’on cesse de mesurer le niveau de la « recherche » au nombre de publications : il n’a jamais été aussi facile de publier, merci la Toile. En revanche, les idées, c’est rare…

Un des arguments forts de la révolte actuelle, c’est la crainte de voir la réforme étendre l’arbitraire des « mandarins »… il y a donc des « mandarins » ? des gens susceptibles de constater, de juger, la vacuité, la pauvreté de certaines « recherches » ? des gens qui, de plus, occupent des postes de pouvoir, juteux, peinards et respectés ? sans hypocrisie, n’est-ce pas le but de la carrière de nombreux enseignants-chercheurs ?

Acteurs

On nous annonce la mort de M. Claude Berri. Tant pis pour le cinéma français, c’est clair.

Et le même jour, on nous sort (Le Monde) un papier sur la  pièce de Thomas Bernhard : « Minetti« , dont l’acteur principal n’est autre que Piccoli. Piccoli le grand, rare, vraiment rare en ce moment, et depuis un bout de temps.

Je ne sais pas comment vous fonctionnez, mais moi j’ai horreur des vedettes. Quand je vois – malgré moi, je fuis ces représentations – débouler Depardieu, quel que soit son rôle, je me dis en moi-même « tiens, voilà Depardieu ». C’est qui l’on veut, c’est Cyrano, c’est un loubard, c’est un boxeur, mais c’est Depardieu. Idem pour Deneuve : « ah, encore Deneuve ». Bon, ils peuvent être excellents, ce n’est pas le problème… simplement c’est eux, on les a vus à satiété, trop vus, c’est fatigant. Et quand c’est Depardieu plus Deneuve, c’est l’overdose.

C’est vrai pour un tas d’acteurs. Le succès use ; Vous mettez Jean-Pierre Bacri sur « Un air de famille », c’est super, on se régale. Vous le voyez bougonner 15 films plus tard : « zut, encore Bacri ». Ce n’est pas que, ce n’est pas qu’on, mais zut, on les voit trop, ces excellents acteurs.

Sauf… sauf quelques uns, quelques unes. Rares ! on les voit, on les revoit, mais ils ne sont pas eux, ils sont leurs rôles. Je n’en citerai que deux, dans notre modeste petit pays. Dustin Hoffman fait ça aussi ailleurs ; mais chez nous, il y a Piccoli, et il y a Huppert.

Huppert-super qu’on peine à reconnaître de film en film ; et Piccoli itou, jamais le même, le fêlé de Dillinger est mort, l’ouvrier cannibale de Themroc, le bourge des Choses de la vie, le financier véreux du Sucre, le maniéré désespéré en collant de la Grande bouffe :  jamais le même.

Bon, je ne vous dis pas d’aller voir Minetti : je ne connais pas la pièce ; je vous dis juste que Monsieur Piccoli, c’est la grande classe.