On a peut-être vu le film – estimable, sans plus – de Verneuil, « I comme Icare », qui illustre les capacités de l’homme à… 1) faire taire ses principes dès lors qu’il est couvert par une autorité supérieure ; 2) s’accoutumer à des situations qu’il ne supporte pas au premier abord. On a aussi – hélas – de multiples retours d’expériences sur l’accoutumance à l’horrible, à l’horreur : l’apprenti-toubib, qui tourne de l’oeil à sa première dissection, fera ça en sifflotant plus tard. Plus sinistre, des gamins de 8-10 ans étaient invités à assister aux décapitations en grande pompe mises en scène par l’Etat Islamique, afin de les accoutumer au sang, à l’insoutenable. Afin de les blinder.
Mais venons-en à mon propos… lisant le Parigot, je suis tombé sur cet article, dans lequel un professeur des écoles, aux yeux noircis et tatoué des orteils aux cheveux, et qui en est fier, argumente ainsi : « Si mon apparence peut contribuer à l’augmentation de la tolérance…». Il se trouve, justement, que l’article en question fait état de la frayeur de parents et d’élèves face à ce spécimen inhabituel d’enseignant, spécimen qui admet être conscient de cette réaction. On est hélas, là, en plein dans l’air du temps, les repères de valeurs ne fonctionnant plus. Qu’est-ce qui est beau, quand tout se vaut, quand une « installation » à base de brouette, pelle et tas de sable est encensée au niveau d’un Murillo ? En quoi est-il positif d’ « augmenter la tolérance », si c’est pour se résigner à tolérer – subir, en fait – la hideur, l’excès, la provocation ?
Eh non, tolérer n’est pas forcément louable (*). Tolérer, c’est céder, quelque part ; tolérons l’autre dans sa différence, soit, mais qu’il ne nous l’impose pas.
Tibert
(*) La tolérance ? il y a des maisons, pour ça, disait Claudel.