… Mes ennemis, je m’en charge !

Tout d’abord, un coup de gueule, ça dégage les bronches : mâame Hidalgo veut introduire des taxis fluviaux sur son territoire – sur la Seine, le canal Saint-Martin, le confluent de la Marne… le lac du Bois de Boulogne ? – bref un machin électrique et futuriste, baptisé « Sea Bubble » par son génial inventeur, un Français. Un Français qui invente la « Bulle de Mer », la « Bulle Marine » (Marine, ça par contre on évite), la « Bulle d’Eau », l’HydroBulle, l’AquaBulle etc… mais non, il faut qu’il la nomme en rosbif… pourquoi ? il a honte ?

Au fait, si vous prenez un jour cette « AquaBulle », cette « Séquanaise » (ce nom-là me botte) pour aller de la Mairie du 17ème arrondissement à la gare Montparnasse, ça va pas mal manquer d’eau sous la quille.

Mais bon… je voulais vous causer d’autre chose : hier j’ai interrompu assez vite le visionnage laborieux du premier débat de la Primaire de la Gauche : c’était très chiant. Trop de candidats, tous coincés et bien propres sur eux avec un balai dans le dos – sauf Bennahmias, plus « nature » et qui s’est payé son anaphore comme Normal-Premier, des fois  que ça marcherait aussi : « L’intérêt général… l’intérêt général… l’intérêt général…« . Ouais… à la rigueur… mais Bennahmias n’a aucune chance, il lui restera sa Belle Anaphore.

Le titre de ce billet, c’est évidemment, vous aurez sûrement complété, « Mon Dieu, défendez-moi de mes amis ; mes ennemis, je m’en charge« .  En effet, « Mon Dieu » mis à part, je lis que monsieur Macron voit venir à lui, se rallier à ses soigneuses rouflaquettes, des tas de gens très bien (Notez, moi je me laisserais bien tenter, tant je suis persuadé que ce pays a besoin de mettre au rebut et sans état d’âme le système existant à bout de souffle et de refonder une démocratie raisonnée, équilibrée,  sobre, simple… je continue ?  – et puis surtout éloignée des idéologies dangereuses et / ou fumeuses façon Frondeurs Socialos ou Libéraux dur-de-dur. Mais le programme ? le programme ? où est le programme ?). Voyez, madame Corinne Lepage, monsieur Jean-Marie Cavada, monsieur Jean Pisani-Ferry… que du beau linge ! enfin, c’est ce qu’on se dit au premier abord. Au deuxième rabord, monsieur Cavada a septante-six ans bien sonnés, soixante-seize c’est l’âge d’une retraite politique bien méritée ; monsieur Pisani-Ferry est plus jeune, lui ; c’est encore pour quelques mois le Chef-en-Chef de France-Stratégie, cette officine-croupion du Premier Ministre qui émet des propositions d’augmenter les impôts au rythme d’un canon anti-aérien, et notamment l’ahurissante taxe pour punir les Français qui possèdent et occupent leur logement. Monsieur Pisani-Ferry, on s’en doute, suit le mouvement général de quittage du navire, si j’ose écrire : c’est qu’il craint de se retrouver chez Popaul-Emploi (enfin, une version améliorée…) quand l’élection sera venue. Il mise donc en fin turfiste sur le cheval qui lui semble tenir la meilleure cote…

Bref, monsieur Macron voit venir à lui tout plein de ralliements sincères de chez l’Ami-Sincère, et pas du tout opportunistes 😉  Ça ne se refuse pas, évidemment, eh eh… mais ça n’empêche pas la lucidité, pas vrai ?

Tibert

Le plus-que-féminin

Grand moment à Stockholm, la remise des prix Nobel en présence de tas de pots de fleurs parfumés et de pingouins… que du beau linge, amidonné et froufroutant. Et puis comme on s’en doutait Robert-Bob Zimmerman-Dylan n’y était pas, pris par ses obligations, mais avait envoyé un mot d’excuse, comme quand gamin il voulait sécher la gym. Pour se faire pardonner, il avait toutefois demandé à sa pote Patti Smith de chanter à sa place un de ses tubes les plus longs – sept bonnes minutes – monocorde et musicalement assez pauvre, mais le texte serait paraît-il très chouette, une fois traduit, évidemment : « A hard rain’s a-gonna fall« , soit « Une pluie dure va pas tarder à tomber« .

Tenez, un bel échantillon :

« Et c’est une dure,

C’est une dure,

C’est une dure,

C’est une dure,

C’est une dure pluie qui va tomber »

Bon, c’est beau mais ça on s’en fout, vous écouterez si ça vous chante Patti Smith interprétant Dylan, c’est assez bien fait, à un moment elle se plante, s’arrête, s’excuse, reprend… émouvant, si si !! certaines écrasaient des larmes furtives. Mais Le Monde, qui nous régale d’un article avec vidéo youyoutube sur ce sujet, y va de cette phrase : « Visiblement bouleversée, sa consœure Patti Smith, chemise blanche boutonnée jusqu’au cou et blazer bleu marine, est venue interpréter A Hard Rain’s a-Gonna Fall ».

C’est, on le suppose, mais si, c’est forcément une coquille ? sa consoeure ? et lui alors c’est son confrèr’ ? et allons-y pour l’orthographe genrée, la beautée de la couleure , et les testiculs du légionnair… et puis tiens tant qu’à féminiser à la hussarde, pourquoi pas la conne-soeure ? ce serait bien plus homogène.

Tibert, nettement genré.

PS – Je trouve ce titre dans la même livraison du même canard, et ma foi je vous le soumets ; comme quoi un énoncé ça se soigne, sinon ça dit n’importe quoi : « Comprendre comment la Planète perd sa banquise en trois minutes« . Donc, le temps d’aller pisser, se laver les mains – pour certains c’est avant de pisser, pour d’autres, après, plus rarement les deux –  un coup de peigne devant la glace, et la banquise est fondue ! pffff, ça craint ! Evidemment, si le titre était « Comprendre en trois minutes comment la Planète perd sa banquise« , on irait pisser plus serein ; ça craint, mais pas si vite tout de même !

 

Le « spoiler » de sa langue

Je lis ce titre dans le Monde : « François Hollande, spoiler de best-seller« . C’est signé d’un certain Philippe Ridet, qui se rit des expressions qu’il pourrait utiliser dans notre langue, caviardant inutilement son titre d’anglais. Spoiler ? quesaco ? gâcheur, pourrisseur, oui, d’accord, et tiens d’ici la fin de mon billet j’en aurai d’autres. Et ce best-seller (ce succès d’édition, mais bon, on a intériorisé ce terme dans notre langue, c’est toujours moins moche que blockbuster ) c’est, si on lit bien le début de l’article, le fameux et harakiri-esque bouquin « Un président ne devrait pas dire ça« . Je l’avais écrit, que la sortie de ce livre était le signe patent qu’il n’y irait pas, FH, au casse-pipe électoral, et qu’il avait renoncé. Je vous l’avais annoncé, vous voyez, mais cause toujours ! on s’entêtait à gloser sur ira-t-y-ira-t-y-pas.

On nous dit que c’est inédit, ce geste. A l’Elysée, c’est exact, les présidents précédents ont tous tenté – s’ils n’avaient pas démissionné ou passé l’arme à gauche – de rempiler en fin de premier mandat. Avec des succès divers d’ailleurs, Mitterand et Chirac oui, mais Giscard et Sarkozy plouf… Ceci dit, il me souvient qu’au Vatican un certain Joseph Aloisius Ratzinger, alias Benoît XVI, a dit « pouce », bien avant FH : il n’y arrivait plus, il en avait ras la tiare de son job de pape, Benoît XVI, et ce geste était une grande première, ses prédécesseurs préférant se crever et crever au boulot. FH est ainsi le second à laisse filer le peloton, à se mettre en roue libre, « continuez sans moi, les mecs« . Eh oui…

Quant à « spoiler« … massacreur, fossoyeur, démolisseur, saccageur, flingueur… on aurait pu trouver bien des termes, en somme. Mais non, incorrigibles journaleux, il leur faut du rosbif !

Tibert

PS : sachant que ce bouquin, « Un président ne devrait etc etc…« , écrit par deux journaleux du Monde, coûte 24,50 euros environ et qu’il est édité chez Stock, calculer le manque à gagner qu’entraîne le renoncement de Moi-Président pour le journal susnommé.

Y a d’ l’abus, et autres contes

Grande nouvelle : un des partis-croupions du PS, j’ai nommé les « radicaux de gauche » (PRG) – émanation sud-ouestienne (accent du Rouergue) de notables locaux soucieux de marquer leur différence et de grappiller quelques menus maroquins tout en restant bien au chaud sous la couette rose des socialistes – vient de désigner sa candidate aux futures Présidentielles de 2017, comme ça toute seule comme une grande. Sylvia Pinel, c’est son blaze : actuelle Grande Cheffe dudit PRG, née dans la Haute-Garonne, études toulousaines, députée du Tarn-et-Garonne,  elle fut le bras droit, elle a cru (du verbe croître) sous l’aile protectrice et bienveillante du baron de la presse  locale, « La Dépêche du Midi« , alias monsieur Jean-Michel Baylet, notable local de chez Notablelocal en Occitanie, et ex-patron du PRG. Tout baigne, tout ronronne donc au PRG, qui est une des figures emblématiques du petit jeu miteux, confiné, désespérant dont les partis actuels nous régalent. Un grand coup de balai, un grand courant d’air frais seront nécessaires.

Mais passons. Je voulais pousser un coup de gueule sur l’abus. Abuse, en anglais, c’est maltraiter, et puis aussi abuser de, comme chez nous. Mais la violence est le sens premier, avec des locutions comme domestic abuse (violence domestique ) ; child abuse (sévices sur enfant, possiblement sexuels, mais pas forcément). L’abus, chez nous en français, n’a pas ce sens de violence. On abuse : on en profite exagérément ; on va trop loin. Ou bien on peut abuser quelqu’un – le tromper, donc – mais la notion de maltraitance n’y est pas. En principe… car je lisais hier ceci dans le Monde, à la page des sports : de jeunes footballeurs anglais « abusés sexuellement« . En fait l’article énonce ceci : « Plusieurs joueurs (…) affirment avoir été victimes, dans leur enfance, d’agressions sexuelles…« . Agressions, et non abus, c’est bien de ça qu’il s’agit.

Eh bien c’est un anglicisme inutile de plus. Abus sexuels ? c’est que vous vous surmenez, ménagez-vous donc un peu, il y a autre chose dans la vie… agressions sexuelles ? il s’agit de tout autre chose, ça tombe sous le coup de la Loi.

Tibert

Phobophobie

J’en ai plus que marre de la « phobie ». Machin-phobie ? c’est la crainte, la peur de Machin. La crainte maladive, irraisonnée, disent certains. Mouais… irraisonnée sans doute s’agissant de l’agoraphobie ou de l’arachnophobie, si l’on excepte les énormes mygales velues. Mais pas partout. Il est des phobies fichtrement fondées, par exemple celle du feu, ou des espaces clos, confinés, la claustrophobie. Mais sur cet article du Monde, qui traite des péripéties mouvementées d’une campagne d’affichage pour la prévention du SIDA, et dans la même dérive du terme que l’illustre islamophobie bien connue, on nous veut nous balancer l’équation phobie = haine. Haine agissante, haine démonstrative, qui plus est – d’ailleurs à quoi pourrait servir une haine muette ?

Haine ? pas du tout ! pas du tout. Certains maires ont fait ôter des affiches de la campagne anti-SIDA dont je vous cause, parce qu’ils ont jugé qu’elles pouvaient choquer, perturber de jeunes âmes. Et hop, les voilà qualifiés d’homophobes (*) – dans le sens « qui haïssent les homos ». Mais en quoi est-ce une manifestation de haine ? On peut comprendre que les assoces anti-SIDA soient déçues que leur campagne soit mal perçue, mais se sont-elles interrogées sur la pertinence et l’innocuité de ces affiches ? a contrario, faut-il accepter tout ce qui émane du milieu homo pour la seule raison que ça vient de lui ? c’est assez similaire à la question qui se pose à une femme draguée par un homme « de couleur », comme on dit : a-t-elle le droit de le rembarrer, parce qu’elle n’a pas la tête à ça, parce qu’il ne lui plaît pas, ou toute autre raison ?  alors c’est au risque de se faire traiter de raciste.

Voilà donc en gros le marché qu’on nous soumet : si vous n’êtes pas pour nous vous êtes contre nous. Ben non, ça ne fonctionne pas comme ça. Ne me demandez pas si je suis colombophile ou colombophobe ; ni l’un ni l’autre ! les colombes, je les côtoie sans problème et bien volontiers – du moment qu’elles ne me bouffent pas mon oxygène et ne cherchent pas à m’enrôler chez leurs groupies.

Tibert

(*)  et non pas « gayphobie », et toc. C’est du grec, pas de l’anglais.

PS – Une lectrice m’interpelle : Si elle me suit bien, ces affiches anti-SIDA me choquent ? ce n’est pas la question (personnellement je trouve les photos assez bénignes, les textes nettement plus discutables, mais rien de pendable) : j’explique dans ce billet que je déteste qu’on me somme d’aimer, sous peine d’être …phobe.

Do U speak Globish ?

Note : ne loupez  surtout pas cet article du Figaro, essentiel à votre quête existentielle en ce premier jour de novembre, augmentation du prix du gaz, du gasoil, des pots de chrysanthèmes… et j’en oublie : « Comment se maquiller pour revoir son ex ? »  voilà qui interpelle, et comment !

Mais j’ai aussi lu – juste pour compléter, il me restait comme une petite faim – cet article, « Quand les grandes écoles de gestion s’agenouillent devant la langue anglaise« , un de plus comme on en lit tant pour dénoncer le lèche-botte, la servilité et la démission de nos « élites » supposées francophones vis-à-vis de l’anglais, ou plus précisément de la langue – largement abâtardie, essentiellement  à base de formules plaquées sur une syntaxe rustique, le Globish – des Etats-Uniens et des affaires, oh pardon du business. Les affaires ? c’est autre chose, une femme dit par exemple « j’ai mes affaires« , rien à voir avec le business, les trends, ça matche, c’est du win-win, je te le forwarde, envoie-moi un acknowledge, on fait du B-to-B (prononçez « bitoubi »),  as-tu  des spares, il faudrait addresser ce problème, sans oublier le traffic et les rush-hours.

On y lit, dans cet article, qu’il existe une Burgundy Business School, en fait une vague école de commerce à Dijon, ville où la mustard  doit faire partie des must, où le Pinot-Noir finira par se cultiver partout alentour, c’est tellement plus user-friendly que de se chamailler sur les mérites respectifs du Côtes de Nuits, du Volnay ou du Maranges.

Et songez que la Communauté Européenne, que les Britanniques ont décidé de déserter – pour être à l’abri des contraintes tout en restant dedans pour le business, et la fille de la crémière avec – se sert essentiellement de l’anglais : ils sont masos, en plus, à Bruxelles… bref c’est triste.

Gardons le moral, toutefois ; si j’ai bon espoir (hopefully, comme ils disent) que le chinois ne parviendra jamais à s’imposer malgré sa supériorité numérique, du fait de sa structure techniquement aberrante et de son apprentissage rebutant (*), je forme le voeu que les langues latines prennent le dessus sur le continent nord-américain lui-même, en l’espèce l’espagnol… l’Amérique Latine est latine, elle, c’est écrit dessus, et, tenez, elle cause en système métrique, ce truc simple, clair et logique que les anglo-américains n’ont jamais pu encaisser, mauvais joueurs qu’ils sont.

Tibert

(*) Les alphabets courants vous imposent une trentaine de caractères à mémoriser, moyennant quoi vous êtes sûr de pouvoir lire 100 % d’un texte, y compris de Jacques Lacan (quant à le comprendre, alors là…).  Le chinois vous demande, lui, d’en mémoriser 2.000 pour pouvoir déchiffrer 97 % des textes écrits (quant à comprendre Lacan traduit en chinois, alors là…)

Bob, Leonard, Georges et les autres

Il semblerait que Bob « Zimmerman » Dylan, après une phase de stupeur silencieuse, d’état de choc (« Fuck ! good Lord ! they nobelized me !« ) , ait recollé à la réalité : le voilà nobélisé « littérature », ce type qui s’obstine à chanter  à soixante-quinze ans, et, oui, il ira si possible à Stockholm, et pourquoi pas costumé en pingouin pour le traditionnel dîner des fracs de pingouins et des décolletés pigeonnants. Notons au passage que si les chanteurs à textes des années 50-80 arrêtaient de bosser assez tôt, soit que la Camarde les réduise au silence – Brassens, 60 ans, Gainsbourg, 62 – soit que, comme disait Goethe avant de mourir, « ça suffit comme ça » pour eux ou pour le public, ceux de nos débuts du XXI ème se montrent d’une longévité remarquable. Songez que Leonard Cohen va sur ses 83 ans, huit de « mieux » que Bob ; je vous épargnerai Aznavour (92), qui écrit et compose, certes, mais ne joue pas dans la même cour…  et Johnny (73) ? ah oui, Johnny… passons. Les membres du jury Nobel ont quand même le sens du ridicule.

Comme l’affirmait à Guy Béart un Gainsbarre sérieusement humecté au pastis, la chanson est peut-être un « art mineur », et ce n’est probablement pas pour ses musiques que Bob D. a été distingué, ni d’ailleurs pour son canotier blanc en peau de zébu. Mais c’est dommage, c’est castrateur : dans les textes des chansons à texte, il y a de la musique, et autour, et derrière, sinon ça ne fonctionne pas bien. Tenez, lisez (écoutez) :

« Hey, Mr Tambourine Man, play a song for me
I’m not sleepy and there is no place I’m going to
Hey, Mr Tambourine Man, play a song for me
In the jingle jangle morning, I’ll come following you »

Vous lisez ça, c’est orphelin de sa musique… c’est un irish coffee sans gnôle… un beurre blanc sans échalote. Les Nobel, vous devez faire un truc, là : lancez un prix de la chanson, texte et musique. Et tâchez de nous dégotter autre chose que les infâmes soupes de l’Eurovision, Conchita Saucisse et consort(e)s.

Tenez, un autre exemple, celle-là, que j’aime beaucoup :

« Trois petites notes de musique
Qui vous font la nique
Du fond des souvenirs
Lèvent un cruel rideau de scène
Sur mille et une peines
Qui n’veulent pas mourir.
.

C’est une valse ! une valse, nom de nom ! un beau texte aussi, bien sûr, mais Alida Valli et Georges Wilson dansent  pudiquement là-dessus, tendres et attentifs l’un à l’autre, et c’est la superbe voix de Cora Vaucaire, tout ça va z’avec, et c’est comme ça que c’est beau.

Tibert

PS – encore un PS !! pfffft… Mais celui-là vaut le coup. Tenez, monsieur Cazeneuve (et sa collègue du Logement, à l’unisson) : Meuhhh nooon, les « junglistes » de Calais ne sont pas venus à Paris, enfin ! quelle idée saugrenue ! Et à côté : « « Selon les associations qui font des maraudes ici, même si tout décompte est très compliqué, on est passé d’environ 1 500 migrants à 2 200 en quelques jours ». Comme quoi les Calaisiens, peut-être enfin moins sous pression, ont partiellement refilé le mistigri aux Parigots, qui vont pouvoir apprécier la situation. Il est juste dommage que la station de métro Stalingrad ne soit pas voisine du Faubourg Saint-Honoré.

 

Dans quel sens ça se lit ? bis

Je regarde assez volontiers BFM le soir sur mon écran bleuté : j’aime les débats qui ont de la tenue mais sans cols amidonnés – beaucoup moins les tonnes de pub qui s’y ajoutent, mais bon, faut bien qu’ils vivent. Il était tout récemment question de la fronde policière, suite aux récentes agressions dont les flics on été victimes dans nos riantes banlieues… et défilent, tandis que le speaker speake et que les débatteurs débattent, des bandeaux d’information divers et variés sur les sujets du jour, Duflot, la bourse de Francfort, les flics en colère, tout ça… et entre autres ce texte que je vois traverser benoîtement l’écran de droite à gauche, pom-pom-pom… :

« Violences contre les policiers – Manuel Valls : « Il ne peut pas y avoir d’impunité contre ces barbares« .

Vous lisez ça, que comprenez-vous ? voyons voir… l’impunité contre ?… ça ne me  dit trop  rien… ah mais si c’était POUR les barbares, d’accord, pas d’impunité pour ces barbares, ah oui là OK… donc alors c’est l’inverse… et CES barbares ? où ça ? les policiers, évidemment, c’est le début de la phrase, CES fait référence aux individus nommés en début de phrase. C’est syntaxiquement clair, non ?

Bref,  je vous invite à un certain recul envers les bandeaux de bas d’écran, à les observer avec circonspection avant de les assimiler, sinon vous allez faire des contresens, vous allez penser que monsieur Valls a pété un câble, ou qu’il fait dans la confusion mentale, ce qu’à Dieu ne plaise : qu’il en reste au moins un qui garde quelque lucidité.

Tibert

 

Des mots, du sens et des accords (désaccord ? )

J’ai regardé un peu la télé ce jour, une chaine d’informations… il y était question d’un débat qui hier – cette nuit chez nous – a opposé Hillary C. à Donald T aux USA. Peu me chaut ce qu’ils se sont dit, vacheries attendues et discours prévisibles, et puis ma religion est faite ; ceci étant, contemplant l’écran sans trop d’intérêt, je voyais y défiler un bandeau de texte libellé ainsi : « H. Clinton s’est dit favorable à…« . J’ai oublié de quoi il s’agissait – ça concernait sans doute l’action de la Russie en Syrie – mais j’ai en revanche bien vu la faute d’accord… H. Clinton est une femme, nous en sommes tous bien persuadés, et qui donc s’est dite favorable à … mais qui aurait pu  s’être dit que l’affaire était dans le sac, etc.

Bon, tout le monde s’en fout, ça ne changera rien aux élections états-uniennes, je sais. Mais les mots ont du sens, Hillary est une femme, il faut le lui accorder (le participe passé). Pour vous y retrouver, remplacez « dit » par « décrit », ou « affirmé », et vous le verrez tout de suite, l’accord…

Pas d’accord, en revanche, sur les qualificatifs employés par le Ministre de l’Intérieur à l’égard des types qui ont pété une vitre d’une voiture, ont jeté un cocktail Molotov à l’intérieur, puis bloqué les portières pour empêcher les passagers de se sortir du véhicule en  feu. Dans notre langue, c’est une  « tentative de meurtre », voire une « tentative d’assassinat » vu que ça a fichtrement l’air prémédité, le cocktail M. ne s’étant pas trouvé là par hasard, désoeuvré, au bord du trottoir. Que ça se soit passé en un lieu peu touristique – je fais dans la litote, là –  et que les victimes soient des flics ne change rien au vocabulaire. Le vocabulaire, le voici, dans la bouche du ministre :

Ces policiers ont été « confrontés à une bande de sauvageons qui ont agi avec lâcheté », et qui seront « rattrapés ».

Le sauvageon, c’est d’abord un « arbre ou arbuste qui a poussé spontanément dans la nature«  ; le ministre ne fait probablement pas référence à ça, mais au sens figuré : »enfant farouche, qui a grandi dans l’abandon et sans éducation, comme un sauvage« . On se souvient peut-être qu’un Ministre de l’Intérieur antérieur, J-P Chevènement, avait employé ce terme imagé en 1999, parlant de mineurs multirécidivistes.  Ce qui avait d’ailleurs fait des vagues, madame Voynet et d’autres trouvant le terme choquant. Ici j’ignore  comment le ministre actuel sait que les agresseurs « ont grandi dans l’abandon et sans éducation« , vu qu’on ne les a pas encore « rattrapés« , comme quand on jouait dans la cour de récré. Mais quand on aura rattrapé ces sauvageons, qu’on leur colle donc une bonne taloche – et un ferme rappel à la Loi, non mais ! – pour leur apprendre à ne pas assassiner comme ça les gens dans la rue. En plus, brûlé vif, ça fait vachement mal.

Tibert

Je suis pour l’anti contre

Je fus ce matin fort tôt interpellé par un titre de la presse quotidienne nationale (« nationale » = parisienne, la presse provinciale n’étant pas nationale) : « Lundi noir de mobilisation en Pologne contre le projet de loi anti-avortement« . Voilà : avec cette histoire polonaise, nous avons une superbe superposition de deux négations, « anti- » et « contre » ; je dirais même plus, trois négations, car « noir » c’est négatif, et tant pis pour le politiquement correct, Septembre noir, journée noire, broyer du noir, voir tout en noir c’est clairement sombre, négatif. Est-ce à dire qu’ a contrario « un lundi blanc« … ?  peut-être, mais si j’avais à peindre, tel Rimbaud ses voyelles, les jours de la semaine en polychromie, lundi serait noir de noir ! donc de mon point de vue,  « Lundi noir », sans être vraiment un pléonasme, c’est un enfonçage de portes ouvertes.

Mais je me souviens vous avoir entretenus, il fut un temps, des circonlocutions ardues et par là-même confuses qu’engendrent les empilements de négations. Au passage, notons qu’à l’inverse, empiler les affirmations, les termes positifs, c’est juste inutile, voire pesant : « Lundi blanc en Pologne pour soutenir le projet de loi favorisant l’avortement« , ce serait d’abord ahurissant, connaissant les Polonais, et puis à quoi bon soutenir un truc qui roule tout seul ? autant aller bosser…  bref, revenons à nos moutons noirs, de quelle négativité parle-t-on ? ici intervient la MORALE, qui va vous indiquer le négatif et le positif.

Tenez : phobie et philie sont négatif / positif, opposés donc, mais dans quel sens ? stop, je vois que vous allez énoncer une ânerie : philie c’est positif, « on aime », phobie négatif ? eh non, ça dépend du préfixe. Questionnez la morale ! le pédophile est un pervers, un prédateur, tandis que le pédophobe… si si ça existe,  j’en connais, est un vieux grincheux qui déteste les gosses, mais après tout ça vaut mieux que l’inverse, pas vrai ? et l’haltérophile ? ni bien ni pas bien, il soulève de la fonte, tout le monde s’en fout ; moi je serais plutôt haltérophobe, par paresse. Dans un autre genre plus kafkaïen, tout négatif, l’hémophilie est affreuse, et l’hémophobie bien gênante !

Revenons à notre lundi noir et polonais : deux-trois négations ça va encore, mais pas plus ! il s’agit en fait pour le gouvernement polonais d’interdire les avortements volontaires et thérapeutiques, et il y a là un non-dit –  mais je vous le dis, c’est dit c’est dit – cela ne supprimera évidemment pas les avortements, mais ça dédouanera les Chefs là-haut de tout conflit moral (!!), et puis surtout ça contentera les catholiques bigots, très nombreux là-bas. Simplement, si ce projet de loi aboutit, les Polonaises décidées à avorter, soit feront appel à l’aiguille à tricoter, la tige de persil, l’injection d’air ou de savon liquide… toutes opérations clandestines et surtout très risquées, soit prendront le large pour aller faire ça moyennant finances et dans des conditions sanitaires correctes en Allemagne, au Danemark ou aux Galapagos… mais pas en Pologne !

Alors reformulons  : la loi en projet en Pologne n’est pas « anti-avortement » : contrairement à un tissu anti-tâches, qui lui ne se tâche pas, sinon on va rouspéter chez le vendeur, elle n’empêchera pas les avortements, tout le monde le sait bien ; elle veut juste les rendre plus difficiles, plus risqués et plus chers. Ce qui est anti-tâches en revanche, c’est la vertueuse initiative du gouvernement polonais. Ce qui illustre bien l’aphorisme oh combien vrai du regretté Léo Ferré-Graine-d’Ananar : « Ce qu’il y a d’encombrant dans la morale, c’est que c’est toujours la morale des autres« .

Tibert

PS – J’apprends avec joie le sauvetage du site Alstom de Belfort, le gouvernement ayant décidé d’acheter urgemment (avec nos sous) quinze TGV pour rouler comme des trains Corail : bonne idée ! qui peut le plus peut  le moins etc etc… Dans le même esprit, si l’usine Aubade à Saint-Savin vient à capoter, mettre la clé sous la porte, je suggère que nos gouvernants achètent pour renflouer ce fleuron national un nombre significatif de dessous féminins, petites culottes, soutien-gorges, guêpières etc.