Lobotomies bouchères

 

Les bouchers français (« Mon boucher, quel talent ! ») ont le blues, et madame Boutin, la passionnaria de la droite catholique, les soutient avec véhémence : « utiliser le terme de boucher est tout à fait déplacé car ici [au salon de l’agriculture, NDLR] il y a des bouchers magnifiques ». Magnifiques bouchers, donc… madame Boutin inclut-elle dans son éloge certains magnifiques bouchers hallal, l’article cité ne le précise pas. Bon, et alors ? Et alors, tout ça parce que monsieur Valls a parlé de monsieur Bachar El Assad, le Chef en Chef dynastique de la Syrie ou de ce qu’il en reste, comme d’un « boucher ». C’était, à sa mimique sur ces mots, visiblement péjoratif – il n’a d’ailleurs pas employé l’adjectif « magnifique », ni aucun adjectif d’ailleurs. Un boucher, point.

Notez bien, on n’a pas vu monsieur Bachar El Assad au salon de l’agriculture, ni pour y faire démonstration de ses talents, ni même pour y flatter le cul de quelques bovins. Flatter le cul de quelques bovins, on le sait, fait partie du circuit incontournable des hommes-et-femmes politiques, y compris madame Royal qui a fait semblant, elle, de flatter le museau d’une vache, c’est moins salissant.

Le cul d’un bovin, justement… est-ce du rumsteak, du faux-filet, de l’araignée ? Dépêchez-vous de le découvrir, ça va disparaître, voyez cette tribune dans Libé, tribune dont je vous recommande la lecture. S’il y a une pétition, je la signe, et des deux mains. Car c’est tout simplement la suppression des informations sur la nature de la viande que l’on nous annonce là. Le merlan, la poire, la bavette, l’onglet, l’araignée, la hampe, le gîte-gîte, le paleron, le jarret, l’entrecôte, le faux-filet, la tranche, le… terminé ! Les grandes surfaces vous informent : Une, deux, trois étoiles, « à griller », « à mijoter », « à bouillir » et basta, vous n’en saurez pas plus. Il vous reste cependant, pour quelque temps encore, la possibilité de demander un morceau qui porte un nom, un morceau non indifférencié en allant chez votre magnifique boucher ; ils résistent, les bouchers, et ils ont bien raison.

On pourrait simplifier encore, remarquez, remplacer les 3-4 termes qualificatifs de la viande par des pictogrammes façon notice de montage Ikea. Pour les primates sommaires que nous deviendrons, ça pourrait donner par exemple, « à braiser » : une cocotte avec un sablier en sautoir, le tout sur quelques flammes stylisées. Clair, non ? Savoir si c’est de la macreuse, du paleron, de la basse-côte, je vous en pose, des questions, moi ? Et comme pictogramme pour signifier le « minerai » éventuellement chevalin qu’on trouve dans les raviolis, un colombin fumant.

Notez, je m’alarme, mais pour le poisson c’est déjà comme ça. « Poisson sauce hollandaise », qu’ils vous annoncent ; est-ce du cabillaud, du lieu jaune, de l’églefin, du colin ? Vous ne le saurez pas. Idem pour le vin. C’est trop compliqué, le pinard, surtout le pinard français, ça empêche de vendre, on vous simplifie donc la compréhension, il n’y a plus grand-chose à comprendre, découvrir, mémoriser. Les terroirs, les millésimes, c’est touffu, c’est ringard, et les agro-bureaucrates-simplificateurs-niveleurs de la planète nous fabriquent et nous fourguent donc par exemple du « Cabernet », c’est bien plus clair que « Saumur-Champigny », « Bourgueil », « Chinon » etc, au moins on sait ce qu’on achète, on n’est pas déçu ! « Coca light », « Cabernet », même combat.

Un « steak » 3 étoiles de chez Carrouf’ avec une boîte de haricots fins « Vert-potager » et une noix de beurre hollandais décongelé, le tout arrosé d’un « Merlot » avec sa capsule alu… ça fait rêver, non ?

Tibert

Rien à dire, mais pas que

Aujourd’hui j’ai d’abord, faute d’inspiration, décidé de tartiner sur le paradoxe-bateau, le pont-aux-ânes de la logique : le syllogisme façon « Aujourd’hui je n’écris rien« . Ce qu’en écrivant je n’écris pas rien, j’écris bel et bien quelque chose, etc, vous connaissez. L’astuce c’est qu’il y a là-derrière un accord tacite entre vous, lecteur-lectrice estimé(e) et moi l’écriveur. Cet accord que je vous impose, tant pis pour vous, c’est que momentanément, c’est en quelque sorte une brève ouverture, j’ai le droit d’exprimer – en peu de mots, sinon ça ne vaut pas – que je me refuse à l’exercice qu’on attend de moi. J’annonce la couleur, même en l’absence de couleur. Tenez : « Je me tais« … comment voulez-vous que je vous signifie que je me tais, si je me tais ?  Vous suivez ? disant cela je ne me tais pas, mais pour mieux me taire ensuite, et vous m’en serez reconnaissants, ça commence à faire long.

C’est kif-kif les pages où l’on trouve écrit « cette page est laissée blanche« , et justement elle ne l’est pas, à cause de ce texte idiot, ou « Je ne sais qu’une chose, c’est que je ne sais rien« . Autre illustration de ce syllogisme apparent : le célébrissime constat que la mesure fausse la mesure (en mécanique quantique, notamment, mais aussi en sciences sociales). C’est-à-dire que les instruments de mesure perturbent et faussent les relevés. C’est donc en s’abstenant de mesurer qu’on obtient les mesures les plus justes.

C’est sur ce dernier principe qu’est basée la politique française sur les « statistiques ethniques ». D’aucuns, essentiellement des tenants de La Bonne Pensée façon MRAP, Libé… s’effraient à l’idée de voir ainsi décomptés anonymement, mais comptés tout de même, les Asiatiques comme des Asiatiques, les Noirs comme des Noirs, les chats comme des chats, etc… : ce n’est pas humaniste, pas charitable. Monsieur Hollande ne dit pas autre chose : non aux statistiques ethniques ! mais sa logique est autre : ce n’est pas La Bonne Pensée qui guide ses propos, c’est  » y a qu’à regarder », en d’autres termes il essaye de nous fourguer en douce la classique démonstration de maths que nous avons tous faite au moins une fois : « il est évident que » (la droite (AB) est perpendiculaire au côté NM du triangle NMP).

Et ça marche ? euh… tenez, les récurrents projets d’introduire de la mixité sociale dans les quartiers…  vous jugez (sans chiffres, donc au doigt mouillé) qu’un quartier est trop dense en Maghrébins ? vous allez tenter d’y introduire des Asiatiques, des Indo-Européens, des… combien ? aucune idée, vous n’avez pas de statistiques. Autre serpent de mer, l’ascenseur social : il fonctionne ou il rouille ? voyons voir… combien de descendants d’immigrés ont atteint l’enseignement supérieur ? hmmm… un certain nombre ? là c’est sûr on a du solide pour avancer !

Voyez-vous, il me vient à l’esprit, entendant Normal-Premier traiter de la non-statistique ethnique comme science sociale, le sketch alcoolisé des regrettés Dac-et-Blanche : le Sarabindranath Duval est assis en tailleur avec son turban, etc… et on lui demande un truc archi-pointu, énoncer le numéro du permis de conduire de la dame, là, au 3ème rang…

« Vous pouvez le dire ?

– je peux le dire !

– Vraiment vous pouvez le dire ?

– Oui !

– Il peut le dire ! » (triomphal, applaudissement nourris).

Tibert

Saint-Jacques flambées au whisky

Je me suis récemment intéressé – une soirée diapos « Retour de pélérinage à Compostelle » m’y incitait – à l’histoire de Jacques, le « patron » de la ville nommée Santiago en Galice. Quel Jacques ? Il y en a des palanquées dans l’histoire des disciples du Christ, dont les deux plus éminents, Jacques « le juste », le cousin de Jésus, mais ce n’est pas lui qui m’intéresse ici ; celui dont je vous cause, c’est Jacques de Zébédée, « Jacques le majeur », un des douze apôtres initiaux. Saint-Jacques, quoi. Soi-disant enterré à Santiago de Compostelle, mais c’est très probablement du flan… Le pélérinage de Compostelle, c’est d’abord une excellente façon de ne pas oublier qu’on a des pieds pour marcher, pas seulement pour aller rejoindre sa bagnole.

Mais bon… il se trouve que l’Espagne a été occupée très longtemps par les Maures, les Sarrasins, etc. Voyez l’Andalousie… et comme  Charles Martel chez nous vers Poitiers en 732, il y a eu des chefs espagnols qui ont combattu ces Maures, et les ont finalement virés, plus tard que par chez nous – ça a pris du temps.

Bref il se trouve que le Saint-Jacques de Zébédée et de Compostelle, là, serait apparu – il était mort et enterré depuis environ sept siècles – au cours d’une bataille, en l’an 834 à Clavijo, bataille où il se chargea lui-même de sabrer moult Maures, retourna le cours des choses et donna miraculeusement, on peut le supposer, la victoire aux Espagnols.

C’était Saint-Jacques le matamore : le mata-Maures (matar : tuer). Vous vous rendez compte ?

Et comment se fait-ce que ce terme, matamore, soit d’usage licite ? C’est clairement un terme insultant dont la Loi devrait proscrire et punir l’usage, ce me semble. Quant à se rendre à Compostelle, à pied, à cheval ou à bicyclette pour y honorer Santiago le matamore, franchement, c’est politiquement malvenu, on devrait déconseiller, pour ne pas heurter certaines sensibilités. D’ailleurs Poitiers, chez nous, c’est limite.

Au fait, en pianotant « Saint-Jacques » sur mon moteur de recherche favori – non ce n’est pas Gougueul – je ne tombe pas sur Zébédée et le matamore, je tombe invariablement sur des recettes de cuisine. Je vous recommande, c’est délicieux, comme indiqué dans le titre, juste farinées, avec un soupçon de crème fraîche pour lier. Ce qu’il faut, c’est du liant.

Tibert

Aphorismes sur l'amour

Non je ne vous entretiendrai pas ici des folâtreries de Normal-Premier, alias Moi-Président : c’est sa vie privée – sous réserve que le chéquier de l’Elysée (les fonds publics) ne soit pas ponctionné pour ses commandes de langouste froide-mayonnaise et de Meursault bien frais au room-service. Allez chercher les détails crapoteux ailleurs.

Non, c’est vrai, zut quoi… je vous cause ici d’une phrase qui m’a ému. Voilà… à propos d’une alerte à un virus sur internet : des petits malins ont, sur Fesse-bouc, prétendu détenir et laisser voir une vidéo de l’accident à ski du fameux Michael (*) Schumacher ; suffisait de cliquer du mulot sur le lien… en exclusivité absolue, évidemment, le scoop du siècle ! je suppose que pas mal de gogos se sont fait bai… avoir, tant c’est passionnant de voir « de l’intérieur » un skieur se prendre une gamelle.

Bref, je lis l’article, je poursuis sur le courrier des lecteurs, et je tombe sur une perle, un bijou, une pépite, je cite : « Ce n’est pas difficile a repérer car le lien de cette soi-disant vidéo menait sur une page externe à facebook et dans 100% des cas ils mènent a une arnaque (…). De mon coté j’ai averti tous mes amis (…) ce n’est pas la seule arnaque de ce type, dès que l’on vous demande d’aimer (**) pour voir, c’est là que commence le cercle vicieux. »

Voilà, tout est dit : dès que l’on vous demande d’aimer pour voir, c’est là que commence le cercle vicieux. Où la pulsion scopique tourne salement en rond sous la tyrannique contrainte de l’amour.

Tibert

(*) Pour les journaleux ignares de la télé : c’est un Allemand, ce monsieur Schumacher, et son prénom, c’est Michael, « mi-ka-ell », pas « maïqueul ».

(**) sur Fesse-Bouc, plein de gens se croient obligés de cliquer connement sur « j’aime », « like » en Rosbif. On s’en fout de ce qu’ils aiment ou pas.

Vérifiez bien

Je le reformule tous les ans : cette énorme affaire commerciale, commerçante, de Noël, a des allures écoeurantes, insultantes, suscite la gerbe. Alors, encore une fois : Noël, c’est tout sauf l’indigeste bûche à la crème au beurre et les amas de paquets-cadeaux. Il faudrait revenir aux fondamentaux, comme disent les entraîneurs de rugby ; rappeler que c’est intime, que c’est l’enfance, la paix et le partage – pour ceux qui y croient. Les autres ? profitez-en, l’enfance, la paix et le partage, ça fait quand même un joli tiercé, même touché dans le désordre.

Mais je reviens à ce qui m’avait inspiré des billets du joli mois de Mai, cette année : le « Mur des cons » du local syndical du Syndicat de la Magistrature. Et, sur le fameux mur, parmi les trombines honnies de ces messieurs-dames les juges qu’on peut, sans trop de risque de se tromper, classer très à gauche, cette apostrophe en lettres capitales : « AVANT D’AJOUTER UN CON, VERIFIEZ QU’IL N’Y EST PAS DEJA ».

On sait que notre actuel Président pratique la blague à froid, l’humour à demi-mots ; moi aussi, j’adore et m’y adonne, et nous nous rejoignons sur ce point – ailleurs je ne vois pas. Il blaguait donc tout en retenue, en esthète de l’humour, sur monsieur Valls, revenu d’Algérie (toujours aussi mal renseigné, il pensait d’abord qu’il devait s’y rendre, mais au fond de la salle on lui fait signe  que c’est l’inverse).  « Il en revient. Sain et sauf, c’est déjà beaucoup« .

Vous voyez tout de suite où le bât blesse dans cette affaire : quand on est Président de la République, on ne peut RIEN dire qui ne soit noir sur blanc, écrit sur les anti-sèches. Il n’y a pas de « off the records« , de propos privés, quand on est Président. Il y a toujours un micro qui traîne dans le coin, un clampin qui filme, un journaleux qui note. « Casse-toi pauv’con » marmonnait entre ses dents le précédent, et malgré le marmonnement ce fut entendu, enregistré, monté en mayonnaise. Ces jours-ci la blague clin-d’oeil de Normal-Premier sur l’Algérie rejoint « Casse-toi pauv’con » au panthéon des con.. âneries à ne pas dire, même en marmonnant.

Mais, rappelons-le : avant d’ajouter gnagnagna, vérifiez bien etc etc.

Tibert

Aujourd'hui, rien

Mais heureusement, l’avenir s’annonce plus prometteur, car « demain, on rase gratis ! » : cette citation est l’équivalent textuel de la fameuse image de l’âne tirant une cariole, à la poursuite de la carotte que le conducteur de ladite cariole a suspendue devant ses yeux au moyen d’un dispositif ad hoc, généralement une ficelle attachée au bout d’un bâton – mais ce pourrait ête un filin déroulé depuis un hélicoptère, ce qui en ferait la carotte la plus chère de toute l’histoire de l’aviation.

J’écris ça, et je réalise que « demain on rase gratis » est une carotte pour mâles, voyez-vous : à part la femme à barbe, quelle individue de la gente féminine pourrait trouver quelque intérêt à se faire raser gratos ? hein ? encore une preuve du sexisme intolérable des coiffeurs et barbiers de tous poils. Ou plutôt de tout poil, plus correct syntaxiquement, sinon orthographiquement.

Et tiens, à propos de syntaxe correcte, je visionnais récemment, il y a peu, ce n’est pas vieux, une video mise en ligne par Libé-sur-Toile ( il reste encore quelques bribes de matière rédactionnelle gratuite, donc consultable sans payer d’abonnement, dépêchez-vous). Tenez, c’est ici.

C’est une espèce de salmigondis de phrases aigres-douces ou carrément agressives, échangées entre « politiques » et badauds, journalistes, militants etc. Certains appellent ça un bestoffe, terme bourratif et indigeste pour signifier morceaux choisis, florilège, sélection, extraits juteux… on y voit et entend donc messieurs ou mesdames Mélenchon, Hollande, Copé, Le Pen, Sarkozy… se faire apostropher, et répondre. Et j’ai des doutes concernant le dialogue tendu entre madame Le Pen et une journaleuse, laquelle selon toute apparence la traite de « raciste ». Madame Le Pen répond sèchement, menaçante : « raciste ? vous pouvez le répéter une deuxième fois ? »

Voilà : si la journaleuse a dit 2 fois « raciste« , ou à la rigueur bégayé, madame Le Pen a bon : il s’agit bien de « répéter une deuxième fois« . En revanche, si l’apostropheuse a dit une seule fois « raciste » – ce qui, à écouter la bande sonore, n’est pas discernable – madame Le Pen a syntaxiquement tort : elle aurait dû répondre « vous pouvez le dire une deuxième fois ? » ou, mieux et plus bref – bref, moins long – « vous pouvez le répéter ?  » , et là, là, d’accord, j’opinerais du bonnet, j’approuverais – syntaxiquement, s’entend, mon propos se borne à cela.

Vous voyez comme ça va la vie ? la dérive de la pensée ? on est là à s’exciter sur une hypothétique gratuité des prestations des barbiers pour la journée de demain, on évitera donc de se raser aujourd’hui pour pouvoir bénéficier pleinement de cette offre promettteuse, et l’on finit par se demander si une journaleuse – de gauche, forcément de gauche, c’est quasi pléonasmique – a traité madame Le Pen de « raciste » une seule fois, ou deux, pour enfoncer le clou. Des fois qu’on aurait mal entendu.

Tibert, perplexe

Vite une bâche !

Huffington, version gauloise, se plante dans ses guillemets. En l’occurrence, il s’agit du titre d’un article – une chronique, en fait, de monsieur Birenbaum, qui a, semble-t-il, la plume d’un rouscailleur, pourfendeur, redresseur, etc. Tenez, voyez : « Birenbaum bashe le « sondage » épouvantable de Midi-Libre sur les Roms« . Les guillemets, c’est autour de bashe qu’ils devraient être, pas sur « sondage« , qui est un terme on ne peut plus normal, correct. Au reste, un sondage sur 3027 individus, c’est tout à fait crédible, représentatif, pour employer le terme ad hoc ; ça n’a pas besoin de guillemets. Précisons : dans l’esprit de monsieur Birenbaum, ce ne sont pas seulement les résultats du sondage qui sont choquants, c’est le fait même d’avoir conçu et réalisé un tel sondage.

« Bashe », en revanche, c’est de l’anglais 100 % pur Rosbif (ça signifie à peu près « cogne sur »), et qui tente mine de rien de se faire passer pour du français. On aurait pu écrire « critique », « éreinte », « enfonce », « démolit », etc, il y a plein de termes possibles. Tenez : « Birenbaum vitupère le sondage épouvantable…« , ça fonctionne très bien, et dans notre belle langue, ma chère.

Mais pour le fond : on en revient, cher Huffingtonne, non à la « bashe », mais à la bâche : ce sondage, si l’on comprend bien la juste pensée de monsieur Birenbaum, il aurait fallu le cacher, tant il est vilain-pas beau. Evidemment si les lecteurs du Midi-Libre avaient à 75 % été choqués par les déclarations désobligeantes du maire de Roquebrune-sur-Argens à propos des Roms, il aurait été judicieux de monter ça en épingle. Mais les résultats, aussi abominables soient-ils, sont pourtant instructifs ! et comment les obtenir, ces pourcentages instructifs, sinon en sondant ?

C’est finalement assez simple ; que je vous explique : vous faites un sondage… si le résultat en est convenable, correct, bien orienté, propre sur lui, digne du PS, de la LICRA et du MRAP, plein de bons sentiments et de charité chrétienne, vous le publiez ; dans le cas contraire, vous le planquez sous le tapis. C’est comme ça qu’on doit faire l’information… la bonne, évidemment.

Tibert

Fous dingues du Made in France

Vous avez remarqué ? le sémillant ministre du Raidissement Progressif, qui, soit dit en passant, joue sa partition assez en solo, nous exhorte tous les quatre matins à acheter, à consommer, et donc à produire du made in France… lamentable !

Tenez, pourtant, sur les journaux-réclames qui abreuvent ma boîte à lettres, et que parfois je me laisse aller à feuilleter – c’est un instant de faiblesse, le « cerveau disponible » cher à monsieur le PDG de TF1 – on peut lire du vrai français : « transformé en France » (c’est de la quiche industrielle aux lardons de batterie), « élaboré en France » (pizza surgelée façon carton peint), et pas « made in France » : ce sont des publicités patriotes, des dépliants trichromie fiers de leurs racines – à ceci près qu’ils persistent à nous infliger des « display 2,8 pouces » quand un « écran 7 cm » serait tellement plus clair. Fabriqué, transformé, élaboré, fait, conçu, produit… en France – avec des mensurations compréhensibles, c’est encore mieux. Produit en France, ça vous irait ?

Car, si l’on est cap’ de produire chez nous, on doit pouvoir l’annoncer, le claironner dans notre langue, non ? ça dépasserait l’entendement des acheteurs étrangers ? ça nuirait à nos exportations ? alors faisons comme dans les notices de montage Ikea, destinées aux analphabètes, je ne sais pas, moi… créons le pictogramme « produit en France » pour les nuls : une clé à molette (indispensable pour produire, la clé à molette !), un drapeau bleu-blanc-rouge, ou un hexagone, une baguette de pain, un béret, un coq, que sais-je , sur fond tricolore, évidemment. Ca vaudra toujours mieux que de l’anglais élaboré en France.

Dans la même dé-veine, je découvre ce matin, atterré, un article truffé d’anglicismes dans, évidemment, devinez ? pas dans le Daily Mail, non, non, dans le Figues-à-rôts. Le titre : Fooding 2014. A quoi ça ressemble, ce mot hideux, fooding ? même les Anglais ne l’oseraient pas, tant c’est moche, utilitaire, bourratif. Nous prend-on pour des animaux de batterie ? tenez, un court extrait, la Bérézina du langage : « …À l’image de ce triple-prix pour la street food (même si top qualité) des super-chefs… » : vous voyez le désastre ? le Redressement Linguistique urge, je vous le dis, moi. A nous les savoureux casse-croûtes de rue, les fricots-trottoirs, tiens,  et les bonnes bouffes, les mâchons, restaus et troquets – les bons ! et laissons le fooding aux silos des stabulations.

Tibert

Kaï kaï au large du Puntland

Je me suis trouvé des affinités avec… avec les pirates maritimes qui sévissent au large des côtes de Somalie et de la corne de l’Afrique ! eux aussi, Britney Spears leur fait mal, du moins quand elle « chante », si l’on peut dire. Moi c’est juste au Carrouf-Marquette ou chez GigaMegaSoldes que l’envie de fuir me tenaille, si j’ai oublié de me munir de mes tampons d’oreilles ; que voulez-vous, acheter des spaghetti ou des courgettes sur fond sonore agressif de glapissements rythmés en langue yaourt c’est dur.

Sur les côtes de l’Océan Indien c’est pareil : les pirates somaliens, du Puntland ou similaire, quand ils ont en vue un navire marchand, pourtant bien rebondi et alléchant, et qu’il leur déverse par dessus le bastingage et à cent décibels les hurlements cadencés et intraduisibles de la célèbre chanteuse anglo-saxonne ça leur caille les sangs : leurs Kalachnikov s’enrayent, leur détermination guerrière s’effrite, ils craquent, ils renoncent.

Le canard anglais, le « Sunday Post » à l’origine de cette information relayée par Le Monde donne des détails : les titres anti-pirates les plus efficaces sont « Baby one more time » (Chéri, encore une fois) et « Oops, I did it again » (Zut, j’ai  recommencé). je suppose qu’il y a là un enchaînement logique : le type à qui on demande de le faire un coup encore, (quoi ? je ne sais pas, j’ai pas bien compris), eh bien, ensuite il s’aperçoit qu’il a gaffé, qu’il a connement remis ça. Remarquez, il a la santé !

On apprend aussi, à lire l’article du Sunday Post, qu’il s’agit là de Culture Occidentale, et que ce sont les oeuvres de madame B. Spears qui ont été spécialement choisies par la marine marchande écossaise, car elles constituent aux yeux des pirates somaliens l’archétype, la fine fleur de cette Culture qu’ils haïssent et redoutent.

C’est un gros progrès accompli dans la voie (ou la voix ?) de la paix depuis 1938 : songez qu’à cette époque, c’était « Wenn ich das Wort Kultur höre, dann greife ich schon an meinen Revolver » (quand j’entends le mot Culture, je saisis mon révolver). De nos jours, c’est (en langue somali, mais je suis sympa, je vous le fais en français) : « Quand Britney Spears me glapit aux oreilles, je rengaine ma Kalachnikov« .

Tibert

PS : l’histoire ne dit pas si le personnel des navires menacés est équipé de tampons d’oreilles. Je suppose que oui, sinon ce n’est pas tenable.

Nabot, guenon et dessert lacté

Hier fut une journée à marquer d’un blanc caillou dans la saga des postures télégéniques de nos députés : eh oui le mercredi au Palais-Bourbon, c’est la télé !  l’occasion de briller sur les écrans et dans les foyers. On vit donc, c’est assez rare, une chouette mise en scène, une solennelle protestation orchestrée par un ténor du PS contre les attaques racistes et de mauvais goût (*) dont fut récemment l’objet madame Taubira. Ce ne fut pas une standing ovation dans l’hémicycle, mais tout comme, et notre Garde des Sceaux en fut émue, on le vit visiblement à ses yeux. Et même la Droite se tint bien en cette occasion, sans gesticulations ni ricanements, juste bien.

Mais hélas les indignations – « indignez-vous, rindignez-vous« , qu’ils disaient – sont borgnes, sinon plus, et fort sélectives. Il me souvient que le physique de monsieur Sarkozy, notamment sa taille modeste lui a valu en son temps de délicats « nabot », sans que les députés s’en émeuvent ni ne se lèvent en séance pour marquer le coup ; que Normal-Premier se tape un surnom de dessert lacté d’aspect jaunasse et gélatineux, que l’austère Jospin, en son temps, etc etc… sans oublier le spirituel « gros cul » attribué à notre verte Duflot.

Pour prendre deux termes très moches, « nabot » et « guenon », je ne vois pas de différence de traitement : ce sont des attaques basses, basées sur un physique pointé comme différent et dérangeant alors que c’est la personne, son action, sa politique, qui sont visées. L’un est raciste, l’autre pas ? c’est vite dit, et sommaire, tant le mot « racisme » est dilué aujourd’hui, jusqu’à ne plus guère signifier que la haine de la différence. Pour moi c’est de la même eau, boueuse.

Les noms d’oiseaux en politique ne datent pas d’hier, cela va de la pique spirituelle et méritée à l’attaque déshonorante. Hélas il n’est pas d’impartialité dans la réprobation des insultes indignes : mesdames-messieurs qui vous indigniez hier, vous a-t-on vus condamner vigoureusement en leur temps les attaques ad hominem haineuses qui brocardaient le physique du précédent Président ? pas que je sache. Voilà qui permet de douter bigrement de la pureté de vos vertueuses postures.

Tibert

(*) On apprenait par la même occasion que, non content de comparer madame Taubira à une guenon, des gamins de familles membres de la « Manif pour tous » avaient brandi des bananes à son adresse ; on reste là dans le même registre : ça ne vole pas haut, pour employer une litote.