Bob, Leonard, Georges et les autres

Il semblerait que Bob « Zimmerman » Dylan, après une phase de stupeur silencieuse, d’état de choc (« Fuck ! good Lord ! they nobelized me !« ) , ait recollé à la réalité : le voilà nobélisé « littérature », ce type qui s’obstine à chanter  à soixante-quinze ans, et, oui, il ira si possible à Stockholm, et pourquoi pas costumé en pingouin pour le traditionnel dîner des fracs de pingouins et des décolletés pigeonnants. Notons au passage que si les chanteurs à textes des années 50-80 arrêtaient de bosser assez tôt, soit que la Camarde les réduise au silence – Brassens, 60 ans, Gainsbourg, 62 – soit que, comme disait Goethe avant de mourir, « ça suffit comme ça » pour eux ou pour le public, ceux de nos débuts du XXI ème se montrent d’une longévité remarquable. Songez que Leonard Cohen va sur ses 83 ans, huit de « mieux » que Bob ; je vous épargnerai Aznavour (92), qui écrit et compose, certes, mais ne joue pas dans la même cour…  et Johnny (73) ? ah oui, Johnny… passons. Les membres du jury Nobel ont quand même le sens du ridicule.

Comme l’affirmait à Guy Béart un Gainsbarre sérieusement humecté au pastis, la chanson est peut-être un « art mineur », et ce n’est probablement pas pour ses musiques que Bob D. a été distingué, ni d’ailleurs pour son canotier blanc en peau de zébu. Mais c’est dommage, c’est castrateur : dans les textes des chansons à texte, il y a de la musique, et autour, et derrière, sinon ça ne fonctionne pas bien. Tenez, lisez (écoutez) :

« Hey, Mr Tambourine Man, play a song for me
I’m not sleepy and there is no place I’m going to
Hey, Mr Tambourine Man, play a song for me
In the jingle jangle morning, I’ll come following you »

Vous lisez ça, c’est orphelin de sa musique… c’est un irish coffee sans gnôle… un beurre blanc sans échalote. Les Nobel, vous devez faire un truc, là : lancez un prix de la chanson, texte et musique. Et tâchez de nous dégotter autre chose que les infâmes soupes de l’Eurovision, Conchita Saucisse et consort(e)s.

Tenez, un autre exemple, celle-là, que j’aime beaucoup :

« Trois petites notes de musique
Qui vous font la nique
Du fond des souvenirs
Lèvent un cruel rideau de scène
Sur mille et une peines
Qui n’veulent pas mourir.
.

C’est une valse ! une valse, nom de nom ! un beau texte aussi, bien sûr, mais Alida Valli et Georges Wilson dansent  pudiquement là-dessus, tendres et attentifs l’un à l’autre, et c’est la superbe voix de Cora Vaucaire, tout ça va z’avec, et c’est comme ça que c’est beau.

Tibert

PS – encore un PS !! pfffft… Mais celui-là vaut le coup. Tenez, monsieur Cazeneuve (et sa collègue du Logement, à l’unisson) : Meuhhh nooon, les « junglistes » de Calais ne sont pas venus à Paris, enfin ! quelle idée saugrenue ! Et à côté : « « Selon les associations qui font des maraudes ici, même si tout décompte est très compliqué, on est passé d’environ 1 500 migrants à 2 200 en quelques jours ». Comme quoi les Calaisiens, peut-être enfin moins sous pression, ont partiellement refilé le mistigri aux Parigots, qui vont pouvoir apprécier la situation. Il est juste dommage que la station de métro Stalingrad ne soit pas voisine du Faubourg Saint-Honoré.