Le beurre, son fric et la crémière espagnole

On dit comme ça en anglais : On ne peut pas avoir son gâteau et le manger. Notre beurre à nous est dans leur gâteau, d’ailleurs, à moins que ce soit de la graisse de rognon de boeuf ? Notez aussi que ce proverbe britannique n’a pas l’extension sexiste souvent donnée chez nous : On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre, avec en prime le sourire de la crémière. Le sourire coquin, prometteur, de la crémière, eh eh.

Oui, bon, c’est pour commenter les propos de monsieur BoJo, Boris Johnson, le pendant capillaire britannique de Donald T. aux States, aussi naturellement blond – et aussi décoiffant dans ses propos. Il ne veut pas d’un Brexit mou, Boris, il le veut dur et jouissif dans sa roideur, pour le bonheur de ses chers compatriotes. Un vrai bon Brexit va nous booster, nous les Grands-Bretons, déclare-t-il en substance à l’occasion de la saint-Valentin, s’opposant ainsi à celles-zet-ceux qui voient dans ce Brexit une ânerie, et je reste poli. Je le cite assez longuement – j’espère qu’il appréciera :

« Nous continuerons encore davantage à prendre des vols bon marché pour des enterrements de vie de garçon dans des villes anciennes, à rencontrer des gens intéressants, à tomber amoureux (*), à nous démener joyeusement pour  apprendre les langues européennes dont le déclin est un effet paradoxal de l’adhésion à l’Europe (…) Il n’y a aucune raison valable pour que nous ne puissions plus prendre notre retraite en Espagne, comme nous l’avons d’ailleurs fait bien avant que ce pays intègre l’Europe, ou n’importe où ailleurs ».

Tomber amoureux… sur le continent, bien entendu ! après avoir pris un vol pas cher sur Vilprix-Coucous, après s’être bourré la gueule à la bière ou au Vermentino du côté de Valencia, Napoli ou Amsterdam pour enterrer sa vie de garçon… après avoir rencontré des gens intéressants – c’est réconfortant : il y en a même sur le continent ! ah, et puis tomber amoureux d’une mignonne Européenne, pratiquer sa langue paradoxalement (!) déclinante – vous voyez d’ici les Anglais se démenant charitablement, doués et motivés comme ils sont, pour acquérir quelques rudiments utiles (« Vous venez souvent danser ici ?  » ; « Sei molto bella« , « Wie heisst du ? « , et autres gracieusetés).

Eh oui, foin d’états d’âme :  ils auront le gâteau tout en le bouffant, avec en prime les tapas sur les ramblas ; non seulement ce sera meilleur, mais tout le reste roulera comme avant ! franchement, pourquoi s’en priver ?

Tibert

(*) Saint-Valentin oblige. Sacré BoJo, toujours aussi fleur bleue !

Quand on la jette au ventilateur…

… ça éclabousse de partout, y compris l’envoyeur !  Vous connaissez sûrement cette savoureuse expression anglaise « the shit hits the fan« . Il se trouve que les Anglais, justement, gesticulent beaucoup en ce moment, engagés dans une partie de poker-menteur avec l’Union Européenne, dans le style « Si vous n’acceptez pas nos conditions dans la négociation post-Brexit on va faire Paradis Fiscal pour vous saboter« .  Tremblez Européens ! Mais les paradis fiscaux existent déjà abondamment – rien qu’en Europe, l’Irlande, et surtout le Luxembourg – et le Royaume-Uni a déjà les siens, les Iles Anglo-Normandes, l’Ile de Man… et n’a guère les moyens de se priver des rentrées fiscales des entreprises : on peut se montrer dubitatif… ceci dit on est prévenus : l’Europe devra se montrer à la hauteur.

Côté Trump aussi ça défouraille dur contre l’Europe : le futur Président nous prédit d’autres Brexit, et la fin de l’UE, rien que ça ! à vrai dire ça l’arrangerait. il est vrai que « Casque d’Or » (*) est habitué aux postures, aux moulinets et aux déclarations fracassantes… tenez, il dit que le mur anti-Latinos se fera, et que le Mexique devra le payer : le Mexique répond que, non, il n’en est pas question ; et Trump de poursuivre « The wall just got ten feet higher« . Traduction : ah ils veulent pas payer ? bon, puisque c’est ça, on va faire un mur plus haut de 3,048 m ! (monsieur Trump n’est pas familier du Système International de Mesures). Il y a aussi selon lui trop de bagnoles allemandes aux USA, ça ne va pas, ça… (à quoi il lui a été répondu que les constructeurs états-uniens n’ont qu’à fabriquer de meilleures voitures). Au fait, monsieur Trump, ça va être à vous d’ici peu : on vous attend au tournant du virage. Et comme dit un autre proverbe sans ventilateur, c’est au pied du mur (plus haut de 3 mètres, chiche ! ) qu’on voit le maçon !

Tibert

(*) Je trouve ce surnom assez chouette et pertinent – et l’inoubliable Simone Signoret ne m’en voudra pas, j’espère : c’est du second degré.

Qu’ils hissent le grand cacatois

Et puis qu’ils larguent les amarres, marre… cap à l’Ouest, tournant le dos à ce continent indécrottable qui ne les mérite pas. Néanmoins et cependant, que prospèrent et yop là boum les liens commerciaux indéfectibles qui permettent de continuer à faire du bizness juteux, zone de libre échange, la City, toutes ces sortes de choses : pas de problème, ça ils aiment.

Reste que l’Europe, allégée des Grands-Bretons, va illogiquement et toute honte bue continuer à user et surtout abuser de la langue que leurs cousins d’outre-Atlantique ont imposée au monde. L’Europe, une armée de traducteurs simultanés ou non, mais au quotidien la langue d’un pays non-membre de l’UE. Cherchez l’erreur… les Irlandais ? ah certes les Irlandais, Européens, eux. Ils la parlent, effectivement, après la langue celte ( celtique ? ) officielle. Ce n’est pas pour autant le grand amour ! et on les comprend, vu leur lourd passé / passif commun.

Tibert

PS – le surlendemain : à Bruxelles-une-fois, on a également constaté que le seul pays de l’UE ayant déclaré la langue anglaise comme sa langue est le Royaume-Uni. Il n’est plus là ? il n’y a plus de locuteur anglais à Bruxelles, ce n’est donc plus une langue de travail de l’UE. Cf l’Express avec cet article.

Brexit kss kss kss

Les Bitanniques – les Anglais certes, mais pas que, ajoutons-y les Gallois, les Ecossais, les Nord-Irlandais – voudront ou ne voudront pas quitter l’Union Européenne, en Juin prochain. Ils y avaient adhéré par référendum déjà, en 1973 avec 67 % de « Oui », un bon 2/3, donc. Et voilà-t-y pas qu’ils se tâtent pour en sortir… quarante-trois ans d’amour (enfin, de cohabitation houleuse) et puis les valises ?
Ils s’en iront peut-être drapés dans leur superbe et leur superbe isolement, pour tourner le dos à ce Continent qu’ils n’aiment pas et d’où viennent tous les dangers et puis la vérole, pour contempler l’Ouest, toujours aussi dépités et cocus de s’être fait jeter il y a bientôt deux-cent-quarante années de ces terres lointaines de l’autre bord de l’Atlantique. Ah s’ils pouvaient se hâler jusques-z’à ces rives, s’ancrer à la Nouvelle-Angleterre faute d’avoir pu ancrer celle-ci à leurs côtes… mais bon. That’s life, « c’est la vie », comme ils disent.

Il est vrai que cette Europe de bureaucrates bruxellois est rien moins qu’exaltante, productrice de directives et de normes plutôt que d’envie d’y croire, à l’écoute bienveillante des lobbies mais pas vraiment des citoyens. De là à retourner à nos petits jeux hexagonaux  étroits assortis de dévaluations aussi ponctuelles que des feuilles d’impôts…

Mais si ces Britanniques nous quittaient, que nous laisseraient-ils ? clairement un sentiment de gâchis, qu’ils se sont foutus de notre gueule, pas européens pour deux balles mais hargneux à défendre leur seul intérêt grand-breton à tous les tournants, faisant monter les enchères pour soi-disant rester mais se barrant quand même. Et nous laissant en cadeau un joli foutoir, et cette langue que deux pays sur vingt-huit pratiquent aujourd’hui – eux et les Irlandais, qui pourtant ne les aiment guère et, tout comme les Etats-Uniens, les foutirent dehors il y a quatre-vingt-dix-sept ans. Ironie et farce de l’histoire, l’Europe Unie resterait unie dans l’usage surtout pas prescrit mais lâchement admis – en dépit des Latins – du langage de ce pays qui va peut-être lui tourner le dos, lui montrer ses fesses tout en lui faisant un bras d’honneur, ce qui demande une certaine dextérité.

Nous restera dans cette hypothèse, logiquement et à notre grand soulagement, à ouvrir tout grand les portes du Calaisis vers la Terre Promise des « migrants », et… mucha suerte ! migliori auguri ! gute Reise ! et bon vent !

Tibert