Je me suis bien diverti au dessin que vous pourrez voir sur cette page web, où deux ouvriers du BTP, sur un chantier du même métal (décor de grues, de fers à béton etc…) échangent ces phrases :
Philinte : « Ce béton est à point : il serait avisé de ne point lanterner »
Cléonte : « Coulons-le sans délai ! ».
Eh oui, il s’agit de la clause Molière, qui stipule que tout travailleur étranger détaché en France doit maîtriser suffisamment notre langue – ce qui suppose donc que les échanges écrits et verbaux se font en français. On imagine donc les Roumains, Polonais etc… passer un exam’ de français avant de pouvoir bosser chez nous. Remarquez, ce n’est pas con : il me souvient d’un ami qui a récemment fait refaire son appartement parisien par une entreprise employant majoritairement des Polonais (c’était farpaitement légal, rassurez-vous, et il y avait dans le tas le légendaire plombier polonais cher à monsieur Bolkestein) : je l’ai trouvé un jour sur son chantier, cet ami, tentant péniblement, dans un allemand fort rustique, de dialoguer avec l’électricien pour lui expliquer le câblage des fils-pilotes des radiateurs. Bizarre, non ?
Je vous résume, et si vous en voulez plus, voyez ici : « Imaginée par l’élu angoumoisin Vincent You, la Clause Molière est un dispositif qui, inséré dans les appels d’offres publics, rend obligatoire la langue française sur les chantiers pour des raisons de sécurité. Si les entreprises ne peuvent se plier à cette obligation, la clause leur impose d’embaucher un interprète assermenté par le tribunal. (…) La Clause Molière a déjà reçu l’aval de la Fédération française du bâtiment… ». La Clause Molière est évidemment destinée à contrer les boîtes qui abusent des travailleurs étrangers détachés, surtout ceux dont le coût salarial est largement inférieur à ce qui est pratiqué en France. C’est encore, à mon humble avis, de ces règles pieuses, « en l’air », dont l’applicabilité n’a jamais été validée sur le terrain, inapplicables donc et qui ne le seront jamais – tout juste invoquées en cas de litiges. Des interprètes assermentés, et quoi encore ?
Mais il y a des cas où ça pourrait fonctionner : en effet des tas de Français travaillent en France avec le statut de travailleurs détachés ! par exemple, vous, Français, vous cherchez du boulot ? vous allez voir un recruteur, il se trouve qu’il est luxembourgeois, ou belge, ou… et il va vous embaucher dans une entreprise de son pays, avec les lois de son pays, et puis vous envoyer bosser chez vous en France. Molière est content, la Clause Molière tourne rond, et c’est la société luxembourgeoise, belge… qui fait son beurre.
Clause Molière donc, pondue par un ou des ronds de cuir retranchés derrière leurs bureaux. Disons Clause Courteline, ce serait plus adapté.
Tibert