Le Code Pénal ne connaît pas l’incivilité. Incivilité ? quésaco ? il traite du crime, de l’infraction, du délit, de la contravention, le Code Pénal. L’incivilité, cette inconnue : allez hop, hors sujet. Garnir un mur de tags ? pas une incivilité, mais punissable pénalement. Pisser (*) ou cracher sur la voie publique, renverser une poubelle ? contravention de 2ème classe (article R632-1 du code pénal modifié par le décret n°2010-671 du 18 juin 2010 –art.4).
Mais justement parce que l’incivilité n’est pas dans le spectre des actions punissables, et vu qu’on baisse de plus en plus les bras devant d’évidentes infractions, d’authentiques délits, de vrais crimes, on y case maintenant plein de trucs, dans le fourre-tout « incivilités ». Comme ça : 1) on manifeste tout de même que ce n’est pas bien, sinon ça ferait désordre ; 2) on passe à autre chose, c’est sans conséquence, et puis on laisse le citoyen lambda raser prudemment les murs et se claquemurer, faute de politique courageuse. C’est ainsi que récemment Macronious, qui a bien intégré ce néo-vocabulaire démissionnaire, a affirmé la tolérance zéro « pour les incivilités » concernant notamment les représentants de l’Etat.
Les mots nommant les maux sonnent bizarre, ces temps-ci, et ça va pas en s’améliorant, comme disait mon pépé. Quand on se percute en bagnole une gendarme à pied comme aux autos tamponneuses, quand on tabasse à mort un conducteur de bus qui réclame le respect des consignes dans son bahut, sont-ce des incivilités ? il serait alors judicieux qu’on élargisse le Code Pénal aux incivilités. Et puis, tiens, tant qu’à faire, comme disait ma mémé, si on l’appliquait ?
Tibert
PS – Je lis ce matin sur France-Info, canard-houèbe bien dans la Juste-Ligne, que Darmanin, le nouveau ministre de l’Intérieur, qui dit vouloir « stopper l’ensauvagement d’une certaine partie de la société », droitise son vocabulaire ! « ensauvagement » avait en effet été utilisé auparavant par un euro-député du RN, le parti de la Marine. C’est épouvantable ! il est des mots qui font mal dans certaines bouches. Car cette belle jeunesse qui (dépouille, percute, deale, tabasse, rackette, surine) … qui s’incivilise, certes, est mal dans sa peau, c’est évident, et ça ne peut être que de notre faute, enfin, de la faute à la société.
(*) Ceci dit, si nos édiles avaient le bon goût de mettre à disposition de la population des édicules à pipi (pour les femmes aussi, merci) en nombre suffisant et en état présentable, ça aiderait à respecter la Loi. C’est coûteux ? certes. Alors rognez sur les frais de bouche, les véhicules de service, les dépenses somptuaires en ronds-points somptueux, que sais-je ?