Vieilles lunes, vieilles rengaines

Je ne t’apprends rien, lecteur estimable – et estimé – en évoquant la morosité de l’industrie françouaise, le blues des entrepreneurs… le pic de chômage, tout ça… pendant ce temps-là en Allemagne et plus généralement en Europe du Nord ça se passe mieux sur ce plan-là, mais il est interdit de se poser la simple question : warum ? (pourquoi ?) et surtout d’y répondre, des insanités bien entendu, des anathèmes sûrement mensongers, ils bossent plus, ils n’ont pas des tonnes de ponts oisifs en Mai, ils sont plus libres d’entreprendre, le travail manuel y est respecté et valorisé, les élites sont aussi celles du mérite, pas seulement celles de la naissance ou du diplôme… etc… bref que des vérités sans intérêt.

Bon, mais ce n’est pas cela qui me pousse à gratter un billet ce matin. Je lis qu’à Saint-Nazaire, les salariés des chantiers navals sont inquiets : le principal actionnaire, le groupe coréen STX, veut retirer des billes, se désengager quelque peu. Et comme l’Etat, notre Etat chéri, est actionnaire pour 1/3 des parts, la complainte unanime des syndicats est évidemment : na-tio-na-li-ser ! bon sang mais c’est bien sûr, nationaliser !

Un problème de carnet de commandes ? Une difficulté à payer les salaires ? Une conjoncture morose ? nationalisons, nationalisons (air des lampions) ! l’alpha et  l’omega des procédures curatives industrielles : l’Etat-poule, l’Etat-papa, l’Etat qui éponge toutes les dettes, pardonne toutes les conneries de gestion, gomme tous les déficits, et finalement entretient sous perfusion tous les canards boîteux.

Et comment parvient-il, l’Etat-papa-maman, à tous ces miracles ? justement, il n’y a, hélas, pas de miracles : il pompe dans les poches des contribuables, ce qu’il sait très bien faire, ça il faut reconnaître. Ou bien, comme au bon vieux temps du Franc, il actionne la planche à billets, dévaluation « compétitive » assurée en  bout de course.

Et, posez-vous la question, croyez vous que de nationaliser, ça va remplir les carnets de commande des Chantiers de Saint-Nazaire ? si c’était vrai, ça se saurait. En fait, il est clair qu’en cas de mauvaise passe et pour des entreprises stratégiques , l’Etat doit donner un coup de main. Certes… aller, par exemple, vanter aux Chinois l’immense savoir-faire, la réactivité, la grande compétitivité de nos chantiers navals. Mais la nationalisation n’est qu’une piqûre d’antalgique doublée d’un somnifère – ça soulage temporairement et localement, ça ne guérit rien du tout.

Tibert